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Rapport de visite du pôle de psychiatrie du centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel (Meuse)

Rapport de visite du centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel (Meuse)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Cinq contrôleurs ont effectué une visite inopinée du centre hospitalier (CH) de Verdun Saint-Mihiel (Meuse) du 9 au 13 janvier 2023. Cette mission constituait un premier contrôle de l’établissement.

Le service de psychiatrie du CH est composé de trois unités d’hospitalisation intersectorielles pour adultes disposant de 52 lits d’hospitalisation complète et d’une unité d’hospitalisation pour adolescents de huit places d’hospitalisation complète. Cette offre répond aux besoins.

Les contrôleurs ont échangé avec des équipes très intéressées de leurs constats et préoccupées d’apporter des améliorations à la prise en charge.

Lors de leur visite, les contrôleurs ont effectué les constats suivants :

S’agissant de l’établissement, le service bénéficie d’équipes paramédicales complètes et pluridisciplinaires avec l’intervention notamment d’une infirmière en pratique avancée. Les remplacements sont bien assurés et la régularité et constance des plannings est exemplaire grâce aux outils mis en place ce qui montre une organisation des soins soucieuse de la stabilité des effectifs. Les arrivants vont être mieux accompagnés par le tutorat qui doit être institutionnalisé prochainement et le comité d’éthique s’inscrit actuellement dans une nouvelle dynamique incluant la psychiatrie. Cependant, le pôle pâtit d’un manque de médecins. De surcroît, il ne dispose pas d’un projet médico-soignant propre et n’organise pas de réunions médicales régulières ce qui serait susceptible de permettre un partage d’expériences. Les soignants sont insuffisamment formés sur les droits des patients, l’isolement et la contention. Enfin, bien que le budget de la psychiatrie soit excédentaire, il n’est pas utilisé pour améliorer le respect des droits fondamentaux du patient (locaux indignes en pédopsychiatrie, absence de verrous de confort aux portes des chambres, véhicules vieillissants, transport entre le centre hospitalier et le site de psychiatrie insuffisamment organisé, etc.).

Sur les modalités de connaissance et d’exercice des droits des patients, l’information écrite et orale des patients est prévue et organisée mais incomplète, certains éléments méritant d’être soit actualisés, soit précisés, soit diffusés (livret d’accueil). En matière d’hospitalisation sous contrainte, les décisions sont formalisées et les notifications effectuées sans retard y compris le week-end mais les patients n’ont pas connaissance du contenu des certificats médicaux. De plus, le contrôle du juge des libertés et de la détention est rendu difficile dans la mesure où la motivation des certificats médicaux s’avère identique d’un certificat à l’autre. Le registre de la loi est bien tenu, en temps réel et lisible mais il ne contient pas la notification des droits et il n’est pas assez visé par les autorités de contrôle.

S’agissant des droits durant l’hospitalisation, la liberté d’aller et venir est restreinte par un principe général de fermeture de certaines unités, improprement déduit du statut des patients en soins sans consentement. Les restrictions dans la vie quotidienne sont rares et individualisées à l’exception du téléphone portable qui est autorisé de façon trop restreinte. Les visites sont facilitées, les communications avec l’extérieur sont assurées, les patients nécessitant une protection juridique bien identifiés mais l’effectif d’assistants de service social ne suit pas l’augmentation du nombre de dossiers. D’autres droits sont insuffisamment organisés qu’il s’agisse de la confidentialité de la présence au sein de l’établissement, du vote, du culte ou de la vie affective et sexuelle. Enfin, la commission départementale des soins psychiatriques exerce un contrôle limité tandis que la commission des usagers n’est pas engagée auprès des patients de psychiatrie.

Sur les conditions de prise en charge, les patients sont hospitalisés dans des locaux propres, bien agencés et entretenus à l’exception des patios qui pourraient être mieux aménagés. Cependant, les fenêtres sont fermées à clé, les portes ne disposent d’aucun verrou de confort et comme aucun placard ne peut être fermé à clé, les patients ne peuvent pas mettre leurs biens en sécurité. En termes d’hygiène, des améliorations immédiates doivent être apportées comme l’installation d’une machine à laver dans une unité, ce qui permettrait aux patients de ne plus recourir à une société extérieure qui pratique des prix prohibitifs. De plus, les repas, servis à des horaires d’usage, pourraient être proposés dans des quantités plus importantes.

Les soins pâtissent principalement du manque de médecins et d’un collège des professionnels de santé qui ne joue pas pleinement son rôle. Néanmoins, un souci de la qualité de la prise en charge a été constaté (projet de soin, absence de prescriptions « si besoin », dynamique pour diversifier et mieux structurer les activités, etc.). Les soins somatiques sont assurés a minima par des médecins qui ne peuvent accomplir toutes les missions même si l’accès aux soins spécialisés du CH ne pose pas de difficultés. Enfin, comme ailleurs, les sorties d’hospitalisation des patients au long court sont rendues difficiles par le manque de structures médico-sociales.

En matière d’isolement et de contention, les chambres d’isolement sont bien entretenues mais certains dispositifs nécessaires sont manquants, y compris pour celle de l’unité d’hospitalisation pour adolescents (accès autonome à la lumière, aux volets, au dispositif d’appel même si contenu, etc.). S’agissant des mesures, les pratiques, exhaustivement tracées, sont modérées tant en termes de nombre que de durée mais le registre n’est pas analysé. L’information du juge des libertés et de la détention sur les mesures d’isolement et de contention se fait selon le cadre juridique mais des difficultés existent notamment au niveau du calcul des délais, qui, en l’absence d’outil informatique adapté, est réalisé manuellement. De plus, le contrôle du juge est limité par des certificats médicaux motivés de façon identique.

Sur les publics particuliers, la prise en charge des personnes âgées pâtit du manque de solutions d’aval.

Les mineurs sont hospitalisés dans une unité spécifique et pris en charge par une équipe complète et pluridisciplinaire (présence d’éducateurs et intervention de trois enseignants notamment). Néanmoins, les locaux sont indignes (configuration inadaptée, vétusté, manque cruel d’entretien) et le médecin de l’unité, qui intervient à 50 %, est un généraliste et non un pédopsychiatre.

Enfin, les détenus sont systématiquement placés en chambre d’isolement et totalement restreints dans l’exercice de leurs droits.

Un rapport provisoire a été adressé le 6 juin 2023 au directeur délégué du CH, à la préfète de la Meuse, à la présidente du tribunal judiciaire de Verdun ainsi qu’au procureur de la République près ce tribunal et au directeur de l’agence régionale de santé Grand-Est pour une période d’échange contradictoire d’un mois. Le directeur délégué du CH a fait valoir ses observations dans un courrier du 6 juillet 2023 qui sont prises en compte dans le présent rapport. Les autres destinataires du rapport provisoire n’ont pas présenté d’observations.

La réponse du CH montre que beaucoup de recommandations ont été prises en compte depuis la visite  : un projet médico-soignant est en cours d’élaboration pour une validation en octobre 2023, une formation sur l’isolement et la contention va être organisée en septembre 2023, l’information des patients a été améliorée sur de nombreux aspects qu’il s’agisse de la confidentialité de la présence au sein de l’établissement, du vote, du culte ou de la vie affective et sexuelle, le registre de la loi contient désormais la notification des droits, des verrous de confort ont été installés dans toutes les chambres en juillet 2023, une ligne budgétaire du plan pluriannuel d’investissement 2024 va être allouée à la pédopsychiatrie afin de financer un entretien régulier du bâtiment notamment.

Les contrôleurs se félicitent donc des améliorations déjà apportées dans la prise en charge des patients et encouragent l’établissement à prendre en compte les autres recommandations formulées.