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Rapport de visite du centre national d’évaluation (CNE) du centre pénitentiaire de Lille-Loos-Sequedin (Nord)

Rapport de visite du centre national d’évaluation (CNE) du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin (Nord)

Observations du ministère de la justice – CNE de Lille-Sequedin

Les visites de contrôle réalisées en 2021 dans les quatre site du centre national d’évaluation (centres pénitentiaires d’Aix-Luynes, Fresnes, Lille-Sequedin et Réau) ont donné lieu à l’élaboration d’un avis sur le centre national d’évaluation (CNE) publié au Journal officiel du 7 décembre 2022.

 

Synthèse

Quatre contrôleurs ont effectué une visite du Centre national d’évaluation (CNE) de Lille (Nord) du 18 au 19 mai 2021. Cette mission constituait une première visite de ce site, qui n’avait pas été contrôlé lors du contrôle du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin réalisé en février 2021 et qui n’existait pas lors de la précédente visite du CGLPL en mars 2010.

Les trois autres sites du CNE ont, par ailleurs, été visités durant les mois de mai et juin 2021.

Un rapport provisoire a été adressé le 7 février 2022 à la directrice du CNE de Lille-Sequedin, à la directrice du centre pénitentiaire de Lille-Sequedin, au directeur général du centre hospitalier universitaire de Lille, au président du tribunal judiciaire de Lille et à la procureure de la République près ce tribunal. La procureure de la République a fait valoir ses observations dans un courrier du 23 février 2022. Les autres destinataires du rapport provisoire n’ont pas présenté d’observations.

Malgré son positionnement ambigu au sein du quartier d’évaluation et de prise en charge aux côtés de l’unité pour détenus violents, le site du CNE de Lille-Sequedin dispose de véritables atouts.

La qualité de la prise en charge, tant au plan matériel qu’humain, est à souligner, sans surenchère sécuritaire. Les conditions de détention sont favorisées par des locaux modernes en excellent état et les mouvements sont fluides. Même si un déficit de formation initiale et continue a été déploré, les intervenants des différents pôles sont apparus comme très impliqués, attentifs et attachés au sens de leur mission à laquelle ils tentent de donner une cohérence globale. Les incidents sont peu nombreux et traités avec célérité.

Les synthèses produites à l’issue de l’évaluation sont pluridisciplinaires et élaborées en concertation ; elles peuvent, en dépit de leur longueur, constituer une réelle aide à la décision des magistrats. Il est d’ailleurs à noter que, contrairement à d’autre sites CNE, une étude est ici menée pour analyser la concordance entre les avis et les décisions. Par ailleurs, les détenus quittent le centre pénitentiaire rapidement, trois jours après la fin de la session d’évaluation.

En dépit de ces nombreux points positifs, la mission de contrôle conduit à formuler plusieurs réserves :

Tout d’abord, la lecture des courriers et l’écoute systématique des conversations téléphoniques des personnes détenues par des agents, qui plus est non-habilités, motivée par la nécessité d’évaluation, est une atteinte à leurs droits dépourvue de base légale, l’article 40 de la loi pénitentiaire ne prévoyant ce contrôle que « lorsque cette correspondance paraît compromettre gravement leur réinsertion ou le maintien du bon ordre et la sécurité ».

En deuxième lieu, la mise en œuvre des mesures liées à l’état d’urgence sanitaire a des incidences très négatives sur les conditions de vie des personnes détenues (parloirs, activités) qui peuvent nuire à la qualité de l’évaluation et le séjour affecte. Par ailleurs, le séjour emporte des effets sur les ressources et les dépenses des personnes détenues.

En troisième lieu, si l’arrivée au CNE est anticipée, l’information communiquée en amont aux personnes évaluées est peu précise.

En quatrième lieu, le cadre même de l’évaluation mériterait qu’une réflexion soit engagée à la fois sur les outils utilisés, sur l’absence d’analyse des pratiques et sur la question de la notification des synthèses aux personnes concernées.

Enfin, la structure même du CNE souffre d’un manque de pilotage central de la part de la direction de l’administration pénitentiaire (difficultés en termes de recrutement, de remplacement et de stabilisation des effectifs, absence de formation spécifique, initiale et continue, proposée aux agents exerçant au CNE, absence de réunions régulières des sites à un niveau central, absence d’analyse des pratiques, insuffisance de pilotage de l’activité des sites).

Les contrôleurs regrettent de ne pas avoir reçu d’observations au rapport provisoire de la part de la directrice du CNE et de la directrice du CP, ce qui ne leur permet pas de savoir si des suites ont été données à celles-ci.