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Rapport de la deuxième visite du centre national d’évaluation (CNE) du centre pénitentiaire Sud-francilien de Réau (Seine-et-Marne)

Rapport de la deuxième visite du centre national d’évaluation (CNE) du centre pénitentiaire Sud-francilien de Réau (Seine-et-Marne)

Observations du ministère de la justice – CNE de Réau (2e visite)

Les visites de contrôle réalisées en 2021 dans les quatre site du centre national d’évaluation (centres pénitentiaires d’Aix-Luynes, Fresnes, Lille-Sequedin et Réau) ont donné lieu à l’élaboration d’un avis sur le centre national d’évaluation (CNE) publié au Journal officiel du 7 décembre 2022.

 

Synthèse

Quatre contrôleurs ont effectué une visite du centre national d’évaluation (CNE) du centre pénitentiaire Sud-Francilien à Réau (CPSF), Seine-et-Marne, du 3 au 5 mai 2021.

Cette mission constituait un premier contrôle autonome, mais le site du CNE avait déjà fait l’objet d’une visite dans le cadre du contrôle du centre pénitentiaire dans son ensemble, en avril 2013.

Les trois autres sites du CNE ont, par ailleurs, été visités durant les mois de mai et juin 2021.

Un rapport provisoire a été adressé le 7 février 2022 à la directrice du CNE de Réau, à la directrice du CPSF, au directeur du groupe hospitalier Sud-Ile-de-France de Melun, à la présidente du tribunal judiciaire de Melun et à la procureure de la République près ce tribunal. Aucun des destinataires du rapport n’ont présenté d’observation.

 

Le CNE de Réau offre, par bien des aspects, notamment matériels et humains, des conditions de détention favorables à une bonne prise en charge et à une réelle évaluation des personnes accueillies (locaux modernes et en excellent état, mouvements fluides et sécurisés, incidents peu nombreux et traités avec célérité), même si les difficultés d’effectifs et la suspension des activités affectaient, au jour du contrôle, leur qualité.

Il souffre, en revanche, d’un certain nombre de handicaps. Certains sont propres à ce site, à commencer par le statut ambigu d’une partie des équipes, et en tout premier lieu l’équipe de direction, partagées entre le CNE et l’unité d’accueil et de transfert.

D’autres sont inhérents à la structure même du CNE qui pâtit d’un manque de pilotage central. La période d’évaluation est bien souvent vécue par les personnes détenues comme une parenthèse dans leur détention, source de nombreuses dégradations dans leur situation (éloignement familial, perte de ressources et dépenses supplémentaires, inactivité, régime de détention fermé, moyens de contrainte, rupture dans la prise en charge médicale, etc.) et porteuse d’incertitudes (manque d’information en amont, durant l’évaluation et à l’issue de celle-ci). Ces constats sont aggravés en période de crise sanitaire et plus encore lorsque le séjour au CNE est prolongé par un passage à l’unité d’accueil et de transfert, parfois excessivement long.

Par ailleurs, la lecture des courriers et l’écoute systématique des conversations téléphoniques, qui plus est par des agents non-habilités, motivée par la nécessité d’évaluation des personnes détenues, constitue une atteinte à leurs droits dépourvue de base légale, l’article 40 de la loi pénitentiaire ne prévoyant ce contrôle que « lorsque cette correspondance paraît compromettre gravement leur réinsertion ou le maintien du bon ordre et la sécurité ».

Sans remettre en cause le professionnalisme et l’engagement des professionnels – qui sont apparus réellement impliqués –, la nature de l’évaluation, qu’elle porte sur la dangerosité ou en vue d’une affectation en établissement pour peine, mériterait d’être précisée par l’administration centrale, tant dans les outils utilisés que dans les rendus attendus.

Pour finir, la structure même du CNE souffre d’un manque de pilotage central de la part de la direction de l’administration pénitentiaire (difficultés en termes de recrutement, de remplacement et de stabilisation des effectifs, absence de formation spécifique, initiale et continue, proposée aux agents exerçant au CNE, absence de réunions régulières des sites à un niveau central, absence d’analyse des pratiques, insuffisance de pilotage de l’activité des sites).

Les contrôleurs regrettent de ne pas avoir reçu d’observations de la part de directrice du CNE et de la directrice du CPSF suite à l’envoi du rapport provisoire, ce qui ne leur permet pas de savoir si des suites ont été données aux recommandations formulées.