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Rapport de la deuxième visite du centre pénitentiaire de Lorient-Ploemeur (Morbihan)

Rapport de la deuxième visite du centre pénitentiaire de Lorient-Ploemeur (Morbihan)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Six contrôleurs et une stagiaire ont visité le centre pénitentiaire (CP) de Lorient-Ploemeur du 2 au 6 et du 9 au 12 juillet 2018 ; il s’agissait d’un second contrôle après celui déjà réalisé en mai 2009.

Depuis la précédente visite, le quartier pour mineurs a fermé et le centre pénitentiaire n’accueille plus que des hommes majeurs. Il compte un quartier maison d’arrêt (QMA, 147 places théoriques), un quartier centre de détention (QCD : 40 places) et un quartier de semi-liberté (QSL : 40 places) ; soit une capacité théorique de 227 places pour 375 lits installés.

L’établissement se caractérise par des conditions matérielles d’hébergement indignes, aggravées par une surpopulation pénale endémique et un sous-effectif des agents.

L’architecture de l’établissement ouvert en 1982 – construit sur le même modèle que l’ancien CP de Draguignan et que le CP de Moulins-Yzeure – est particulièrement biscornue et totalement inadaptée ; l’ensemble est vétuste, mal entretenu et de nombreux éléments du bâti (dalles de sol, colles, peintures, menuiseries, etc.) répartis sur l’ensemble des bâtiments contiennent de l’amiante. Le chantier de désamiantage et de restructuration était en 2018 une préoccupation majeure de la direction et de la direction interrégionale. Les cellules « doubles » n’occupent une surface que de 8,3 m2 et accueillent parfois trois occupants, et celles dotées de deux lits superposés – d’une surface de 17 m2 – hébergent régulièrement cinq à six personnes. Les cellules sont très dégradées (carreaux cassés, mobilier manquant, absence de cloison pour isoler les sanitaires dans certaines d’entre elles, pas d’interphonie au QMA et au quartier d’isolement, etc.), les douches sont très vétustes et certaines hors d’usage, les cours de promenade sont dépourvues de tout équipement, l’unité sanitaire est hébergée dans des locaux qui ne respectent pas la confidentialité des consultations, etc.

La seule véritable évolution positive depuis la première visite réside dans la construction de nouveaux parloirs respectueux de l’intimité mais les unités de vie familiale et les parloirs familiaux, achevés et équipés depuis mai 2018, ne sont pas ouverts faute de personnel suffisant.

Le 1er juillet 2018, le centre pénitentiaire comptait 326 personnes détenues hébergées dont 273 au QMA ; soit un taux d’occupation de 185,7 %. Neuf matelas au sol étaient disposés dans ce quartier, notamment dans des cellules de 8,3 m2. La surpopulation pénale au QMA est endémique et le niveau d’occupation en augmentation en 2018 par rapport à l’année précédente, oscillant entre 168 et 186 %.

L’état des effectifs de surveillance et d’encadrement s’est sensiblement dégradé depuis le contrôle de 2009 ; outre les treize vacances de postes et les neuf agents se trouvant dans une position administrative les rendant indisponibles pour le planning du service, les agents du service origine doivent composer avec un niveau élevé d’absentéisme pour raison médicale : 9,2 % entre le 1er janvier et le 30 juin 2018. Cette situation a des répercutions lourdes sur le travail des agents présents (notamment celui des officiers qui ne sont que deux sur les quatre postes prévus) et la prise en charge des personnes privées de liberté.

Ces constats, déjà partiellement effectués en 2009, s’accompagnent d’un climat en détention particulièrement difficile. La remise en ordre, attendue de la nouvelle direction, faute d’un management attentif, ne s’est pas effectuée sur la base d’une alliance confiante avec les agents. L’instauration de nouveaux modes ou règles de fonctionnement en détention, la plupart non écrits, déployés sans véritable information ou explication, parfois interprétés de façon hétérogène, crée une insécurité juridique et un stress important chez les surveillants comme chez les personnes détenues. L’ordre et la discipline ne s’établissent pas sur le fondement de notes de service, claires et partagées mais sur des décisions parfois orales, souvent prises sans la concertation nécessaire quand elles impliquent des partenaires.

Ces modes de fonctionnement ne semblent pouvoir évoluer favorablement qu’avec une assistance externe.