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Rapport de visite du centre Henri Ey – pôle de psychiatrie du centre hospitalier de Péronne (Somme)

Rapport de visite du centre Henri Ey – pôle de psychiatrie du centre hospitalier de Péronne (Somme)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Trois contrôleurs ont visité le centre Henry Ey, qui abrite l’unité d’hospitalisation à temps complet en psychiatrie du centre hospitalier (CH) de Péronne (Somme), du 9 au 12 octobre 2023. La visite avait été annoncée la semaine précédente. Le rapport provisoire a fait l’objet d’observations de la part de l’établissement et de la direction générale de l’agence régionale de santé (ARS) des Hauts-de-France.

Le CH de Péronne prend en charge la population adulte du secteur de psychiatrie 80G05, qui s’étend sur 1 860 km², des communes samariennes de Fins à Omiécourt du Nord au Sud et de Dernancourt à Ham d’Ouest en Est. Il dispose de son propre service d’accueil d’urgences (SAU), ouvert 24/24h. Il a étoffé son offre ambulatoire en psychiatrie dès les années 1980 et 1990 en complétant son hôpital de jour et ses trois centres médico-psychologiques (CMP) par des places d’appartement thérapeutique, des places d’accueil familial, un appartement géré par l’association sociothérapique Le Vent et des centres d’accueil thérapeutique à temps partiel (CATTP) afin de rapprocher les lieux de soins des patients.

Les patients en soins sans consentement ne sont hospitalisés à Péronne que depuis 2008, dans le centre Henri Ey, distant de quelques centaines de mètres du site principal du CH et offrant une unique unité de 19 lits.

Le CH de Péronne est en direction commune avec le CH de Saint-Quentin (Aisne) et est membre du groupement hospitalier de territoire (GHT) Aisne-Nord / Haute-Somme. L’établissement est en procédure de suivi budgétaire, sans impact sur l’activité de psychiatrie, qui s’inscrit volontiers dans la politique d’appel à projets. Le projet d’établissement est en cours d’élaboration lors de la visite, depuis l’arrivée d’une nouvelle directrice déléguée. Il en sera de même du projet médico-soignant du service de psychiatrie pour adultes. L’équipe de psychiatrie appuie ses pratiques et le fonctionnement sur son expérience de la psychothérapie institutionnelle, sans pouvoir recourir lors de la visite à un espace recevant les questionnements éthiques.

Le service est confronté à la pénurie de psychiatres. L’étayage des équipes et la continuité des soins s’en ressentent mais ni la durée moyenne de séjour (DMS), stabilisée à environ quinze jours, ni le taux d’occupation de l’unité, chaque année inférieur à 60 % en moyenne. Les liens entre l’extra et l’intrahospitalier sont anciens et étroits.

Les patients sont aux trois-quarts hospitalisés en soins libres. Les soins sans consentement (SSC) se composent majoritairement de soins sur décision du directeur d’établissement (SDDE) et dans une moindre mesure (16,6 % en 2022) de soins sur décision du représentant de l’Etat (SDRE) ; les décisions de SDDE sont fondées pour plus de la moitié sur la procédure de soins sur demande d’un tiers en urgence (SDTU) et pour le reste sur la procédure de soins en péril imminent (SPI), qui sont moins protectrices des droits des patients, faute de ressources médicales en nombre et qualité adaptés à la rédaction de plus d’un certificat médical sur le territoire.

Les patients qui passent par le SAU du CH de Péronne sont susceptibles d’être enfermés dans une chambre aménagée comme un chambre d’isolement sans mise en œuvre de la procédure relative à l’isolement et à la contention. Ils sont de surcroît soumis en permanence à un dispositif de vidéosurveillance.

Une fois au centre Henry Ey, la prise en charge est bienveillante mais entachée d’habitudes et peu formalisée, qu’il s’agisse de l’information à l’accueil, de l’information spécifique du patient en SSC, de l’inventaire et du stockage des biens retirés, de la recherche du consentement et de l’adhésion aux soins, etc. Elle est peu restrictive en matière de libertés individuelles, sauf s’agissant de la liberté d’aller et venir en raison de la fermeture permanente de la porte de l’unité pour tous les patients accueillis et de l’inaccessibilité des chambres de 8h à 9h, de 10h à 13h et de 16h à 20h, contraignant les patients à rester au rez-de-chaussée.

Les conditions matérielles d’hébergement sont par ailleurs très satisfaisantes, même si les contrôleurs regrettent l’absence de verrou de confort aux portes des chambres.

Des moyens sont consacrés aux activités thérapeutiques.

Il est recouru avec parcimonie à l’isolement et à la contention (moins de 10 % de la file active hospitalisée) et pour des durées maîtrisées. Mais l’analyse des pratiques sur la base des données collectées dans un registre n’est pas encore réalisée, alors que des méthodes alternatives tendent à se développer.

Les contrôles de l’hospitalisation s’exercent à distance : dans le temps s’agissant de la commission départementale des soins psychiatriques qui les avait interrompus jusqu’en 2023 ; dans l’espace s’agissant du juge des libertés et de la détention qui tient son audience à Amiens (Somme).

Les professionnels du service et la direction de l’établissement, soutenus par l’ARS, se sont montrés à l’écoute des remarques faites lors de la visite et particulièrement réceptifs des recommandations formulées dans le rapport, attestant par les observations formulées en retour de leur volonté réelle d’évolution.