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Rapport de deuxième visite de la maison de santé d’Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis)

Rapport de deuxième visite de la maison de santé d’Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de quatre semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Six contrôleurs ont réalisé une visite inopinée de la maison de santé d’Épinay-sur-Seine (Seine-Saint-Denis) du 5 au 9 juin 2023 qui avait fait l’objet d’un contrôle en 2014.

Cette maison de santé est un établissement privé membre du groupe LNA (Le Noble Age) Santé disposant d’une autorisation pour accueillir 46 patients en soins sans consentement pour 200 lits répartis en quatre unités.

Dans un domaine arboré d’une superficie de deux hectares situés sur les berges de la Seine, sont regroupées les unités d’hospitalisation ainsi qu’un hôpital de jour de 25 places, un centre de sismothérapie et un service de postcure de 50 lits s’apparentant à un service de réhabilitation psychosociale. Le dynamisme de l’établissement doit être souligné. Un espace de vie comprenant trois lits de nuit pour des patients évoluant vers un hébergement autonome est en rénovation et l’autorisation de créer 12 lits de médecine qui permettront de prendre en charge les comorbidités somatiques des patients de psychiatrie provenant des hôpitaux psychiatriques de la région a été obtenue. Impliquant pour la maison de santé une absence de visibilité et une diminution du budget de fonctionnement, l’application en l’état actuel de la réforme du financement de la psychiatrie est une préoccupation.

Les contrôleurs ont visité les trois unités accueillant des soins sans consentement soit 154 lits dont 34 chambres doubles, le reste en chambres simples. Les locaux sont parfaitement équipés et le parc est en accès libre. Les salons famille sont en cours d’aménagement. La grande diversité des activités occupationnelles et thérapeutiques proposées à tous contribue à la qualité des soins dispensés.

Les personnes en soins sans consentement sont accueillies dans les mêmes unités, toutes ouvertes, que les personnes en soins libres. La prise en charge quotidienne, somatique et psychiatrique répond aux besoins, ce que confirment les patients rencontrés. Les professionnels travaillent en coopération et la communication est efficace. Toutefois, la recherche du consentement est incomplètement mise en œuvre. Les restrictions dans la vie quotidienne sont limitées et les souhaits et habitudes de vie des patients sont respectés. De nombreuses sorties sont possibles pour conserver le lien avec ses proches et réaliser des démarches. Cependant, le système de détection des mouvements confine les patients dans leur chambre de 23h00 à 7h00.

L’établissement a fait le choix historique de ne jamais pratiquer la contention.

Il a également la volonté de limiter le recours à l’isolement et d’importants travaux ont permis l’installation dans chaque unité des espaces d’apaisement, démarche très rarement observée lors des visites. Une unité a débuté leur utilisation afin de réaliser une évaluation avant l’ouverture de tous les espaces, prévue à la fin de l’année 2023.

Chaque unité compte deux chambres d’isolement totalement rénovées et répondant globalement aux attentes en matière d’aménagement. Les pratiques d’isolement sont mesurées et le déploiement d’un nouveau logiciel doit permettre de renseigner correctement le registre. Le cadre légal est insuffisamment respecté s’agissant de la double évaluation psychiatrique quotidienne, de l’information des proches, de la formalisation des décisions de renouvellement et de la saisine du juge des libertés et de la détention.

Des mineurs ont été hospitalisés dans les unités destinées aux adultes et des isolements de mineurs en soins libres ont été pratiqués hors le cadre légal.

La commission départementale des soins psychiatriques est inexistante dans le département de la Seine-Saint-Denis.

Les constats exposés lors de la réunion de restitution ont été accueillis de façon constructive.

Le rapport provisoire a été adressé le 20 octobre 2023 à la maison de santé, aux autorités judiciaires du tribunal de Bobigny, à l’Agence régionale de santé Île-de-France et à la préfecture de Seine-Saint-Denis pour une période d’échange contradictoire d’un mois. A l’issue, seul le directeur de la maison de santé a adressé ses observations le 27 novembre 2023, lesquelles ont été intégrées dans le présent rapport définitif.

Le CGLPL souligne que la maison de santé a, dès réception du rapport provisoire, déployé un plan d’actions, actualisé ses processus et engagé des changements concrets en faveur des droits des patients.

Le CGLPL encourage les équipes de la maison de santé à poursuivre leur engagement et à programmer les ajustements restant à réaliser.

L’établissement compte des professionnels mobilisés, communiquant aisément entre eux et soucieux de questionner leurs pratiques pour les faire évoluer. Ils s’impliquent pour déployer des dispositifs susceptibles d’accompagner l’évolution du patient.