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Rapport relatif à la dignité des conditions de détention au quartier des femmes de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard)

Rapport relatif à la dignité des conditions de détention au quartier des femmes de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard)

Observations du ministère de la justice – Quartier des femmes de la maison d’arrêt de Nîmes

Ce rapport a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations. 

 

Synthèse

La maison d’arrêt de Nîmes (Gard) ‒ relevant de la direction interrégionale des services pénitentiaires de Toulouse (Haute-Garonne) et située dans les ressorts du tribunal judiciaire et de la cour d’appel de Nîmes ‒ offre 20 places pour les femmes prévenues et condamnées dont une place pour une mère et son enfant, 158 places pour les hommes prévenus et condamnés, 16 places pour des hommes en semi-liberté.

Cinq contrôleurs ont examiné les conditions de la prise en charge à la maison d’arrêt des femmes (MAF) du 4 au 8 juillet 2022. Lors de cette visite, 42 femmes détenues et un nourrisson étaient hébergés.

Alors que la MAF est conçue pour n’accueillir que des personnes seules en cellule, la réalité est que cinq femmes détenues seulement bénéficient d’un encellulement individuel (en comptant la mère hébergée à la nurserie), soit 11,9 % des femmes. La suroccupation à 210 % contraint une femme sur sept à dormir sur un matelas au sol ou sur un sommier de fortune (armoire couchée).

Bien que 36 % des femmes détenues aient une activité rémunérée, une sur six bénéficie de l’aide accordée aux indigentes.

Malgré la difficile communication d’éléments statistiques, il apparaît que les détenues sont adressées principalement par la juridiction de Montpellier (Hérault) ; 54 % d’entre elles ont le statut de condamnées. La surpopulation empêche de tenir compte du statut pénal dans la répartition en cellule : une prévenue sur trois cohabite avec une ou plusieurs condamnées.

Malgré la surpopulation, la charge de travail pour la surveillante demeure raisonnable. La suppression de la brigade dédiée au quartier maison d’arrêt des femmes a entraîné, selon les témoignages convergents des professionnels et des détenues, une dégradation de la prise en charge, certaines surveillantes, non volontaires, se montrant peu à l’aise avec ce public et excessivement rigides.

La moitié des femmes incarcérées dispose d’un espace vital inférieur à 3 m², critère d’indignité selon la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Le faible espace réellement disponible, une fois le mobilier décompté, porte à 88,1 % la part de détenues qui sont hébergées dans des conditions indignes.

Certains équipements indispensables tels que les ventilateurs ne sont accessibles qu’à l’achat. La surface des cellules ne permet pas d’adapter le mobilier et les possibilités de rangement au nombre d’occupantes. Cela contribue aux mauvaises conditions d’encellulement.

Le manque de luminosité dans les cellules est aggravé par le triple dispositif de sécurité aux fenêtres (sauf à la nurserie) et l’éclairage artificiel proposé est insuffisant. La présence d’une douche en cellule et le cloisonnement des sanitaires permettent un accès aux besoins d’hygiène dans de relativement bonnes conditions de dignité et d’intimité malgré la promiscuité imposée.

L’offre théorique d’activités et le temps à l’air libre en promenade conduiraient chaque femme détenue à pouvoir passer en moyenne six heures par jour en dehors de sa cellule si les activités étaient fréquentées dans leur plein potentiel et ne se chevauchaient pas, ce qui n’est pas le cas. Cette offre est constituée pour plus de la moitié de temps de promenade et pour près d’un tiers de temps de travail.

Si les éléments statistiques fournis ne permettent pas d’analyser les phénomènes de violence au sein du quartier femmes, il ne ressort pas des témoignages des actes de violence d’une particulière intensité. L’absence d’interphonie en cellule ne participe pas à la prévention des atteintes à l’intégrité physique ou psychique.

En cellule, l’aménagement des toilettes et des douches respecte en partie l’intimité malgré la suroccupation.

Selon les témoignages, la pratique des fouilles à nu est relativement modérée.

L’offre sanitaire permet un accès aux soins somatiques et de santé mentale sans perte de chance au sein de l’établissement, y compris pour les soins gynécologiques. Il n’a pas été possible d’identifier si les difficultés rencontrées pour réaliser les extractions médicales programmées, observables chez les hommes, concernent aussi les femmes.

Rien n’est organisé pour aider une personne à mobilité réduite dans ses besoins quotidiens.

Du fait de la configuration des parloirs, les conditions matérielles des visites sont attentatoires à l’intimité et à la dignité. Le maintien des liens avec l’extérieur est encore compliqué par l’absence de salon familial ou d’unité de vie familiale.

Les modalités d’accompagnement des détenues par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) ne favorisent pas particulièrement les alternatives à l’incarcération. Cependant, les possibilités offertes aux détenues d’investir l’exécution de leur peine par des activités facilitent l’anticipation des sorties de détention en octroyant des libérations sous contrainte et des aménagements de peine.

Dans l’ensemble, la cellule disciplinaire est dans un état satisfaisant mais il y fait chaud et sombre. De plus, l’absence de séparation visuelle autour de la douche ne garantit pas l’intimité des personnes qui l’utilisent.

Si la procédure du recours ouvert à l’article 803-8 du code de procédure pénale est connue des professionnels, l’établissement n’informe pas les détenues de la possibilité d’exercer un recours pour conditions de détention indignes.

Le transfert est la solution privilégiée pour anticiper d’éventuels recours fondés sur les conditions de détention, sans modifier, in fine, la réalité de la situation de surpopulation.