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Rapport de la troisième visite de la maison d’arrêt de Brest (Finistère)

Rapport de la troisième visite de la maison d’arrêt de Brest (Finistère)

Observations du ministère de la justice – Maison d’arrêt de Brest (3e visite)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations. 

 

Synthèse

Six contrôleurs ont effectué une visite inopinée de la maison d’arrêt (MA) de Brest (Finistère), du 31 janvier au 9 février 2022. Cette mission constituait une troisième visite faisant suite à un premier contrôle réalisé en mai 2010 et à un deuxième intervenu en mars 2016.

Le rapport provisoire rédigé à l’issue de la visite a été transmis le 8 novembre 2022 au directeur de la MA, aux chefs de juridiction du tribunal judiciaire de Brest, à l’Agence régionale de santé de Bretagne et à la direction du centre hospitalier régional universitaire de Brest. Seul le chef d’établissement de la MA a fait valoir ses observations, le 8 décembre 2022, intégrées dans le présent rapport définitif.

Au premier jour de la mission, la maison d’arrêt hébergeait 349 détenus dont 18 au quartier des femmes, 4 au quartier des mineurs, 16 au quartier de semi-liberté et 311 au quartier maison d’arrêt des hommes, soit un taux d’occupation de 147 % dans ce quartier, expliquant la présence de cinq matelas au sol. Ce taux d’occupation était néanmoins plus faible que celui habituellement constaté (taux moyen de 172,7 % en 2021), sans que les interlocuteurs rencontrés soient en mesure d’expliquer ce phénomène qui semblait conjoncturel, laissant donc craindre une nouvelle flambée de surpopulation à court terme.

La prise en charge des détenus pâtit des effets conjugués de la surpopulation et du manque d’effectif. Une dizaine de postes de surveillant, partis en retraite et non remplacés, manque à l’organigramme et le taux d’absentéisme, longtemps très faible, est récemment passé au-dessus de la moyenne de la direction interrégionale. De ce fait, l’organisation des mouvements est considérablement dégradée, particulièrement ceux des femmes vers l’unité sanitaire. Des secteurs entiers de détention sont régulièrement découverts, un surveillant devant effectuer concomitamment la surveillance de deux quartiers.

Les conditions de détention souffrent du caractère vieillissant des bâtiments (qui datent de 1990) et de leur manque d’entretien (manque de personnel aux services techniques) : absence de douche et de réfrigérateur en cellule, mobilier dégradé et en nombre insuffisant par rapport aux occupants de la cellule, vétusté des cellules dont la remise en peinture est compromise par la suroccupation. Les cours de promenade ne bénéficient quasiment d’aucun aménagement. Par ailleurs, les installations, datant de 30 ans et n’ayant été conçues que pour 236 places, dysfonctionnent : des problèmes de chauffage et d’approvisionnement en eau chaude sont à déplorer dans certaines zones. Les conditions de vie et de prise en charge des détenus au QSL sont par ailleurs particulièrement inadaptées.

Au moment de la visite, en raison du contexte sanitaire, la quasi-totalité des activités collectives (bibliothèque, activités socio-culturelles, enseignement chez les adultes) sont suspendues depuis plus d’un mois. Les occasions de sortir des cellules, vétustes et suroccupées, sont rares, d’autant que depuis le début de la pandémie en 2020 il n’y a qu’une promenade quotidienne. Les possibilités de travail aux ateliers sont très nettement insuffisantes (huit postes) – alors que l’espace permettrait d’accueillir une cinquantaine de travailleurs – et ne cessent de diminuer depuis les précédentes visites du CGLPL. L’offre au service général et à la formation professionnelle ne suffit pas à compenser le manque d’activité. Le manque d’offre de travail est particulièrement criant chez les femmes.

Si le nombre de caméras de vidéosurveillance a considérablement augmenté depuis la précédente visite, celles implantées dans les cours de promenade des hommes sont obsolètes (la moitié ne fonctionne pas) et ne permettent pas d’enregistrer les images. Cette situation pose naturellement des problèmes de sécurité des détenus, d’autant qu’il n’y a pas de portique de détection des masses métalliques à l’entrée des cours.  La mise en œuvre des fouilles intégrales ne respecte pas les principes de nécessité et de proportionnalité et nombre d’entre elles ne sont pas tracées. Le recours au menottage lors des extractions est quasi systématique, y compris pour des personnes détenues en niveau d’escorte 1 et ayant déjà bénéficié de permission de sortir ; il est bien souvent accompagné du port des entraves (y compris pour les escortes 1).

La prise en charge sanitaire est globalement satisfaisante. L’unité sanitaire dispose de locaux récents, spacieux et adaptés et de personnel en nombre. Les temps médicaux sont pourvus et des spécialistes se déplacent à l’établissement. Néanmoins, de nombreuses extractions médicales sont annulées par manque d’escorte disponible alors même que l’unité sanitaire a récemment diminué par deux le nombre d’extractions programmées (passant de quatre à deux extractions quotidiennes).