Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de visite du pôle de psychiatrie du centre hospitalier Loire-Vendée-Océan à Challans (Vendée)

Rapport de visite du centre hospitalier Loire-Vendée-Océan à Challans (Vendée)

Observations du ministère de la santé – Centre hospitalier de Challans

 

Synthèse

En application de la loi du 30 octobre 2007 qui a institué le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, quatre contrôleurs ont effectué une visite du Centre Hospitalier Loire-Vendée-Océan (CHLVO) − département de la Vendée − du 1er au 4 mars 2021. Il s’agissait d’une première visite.

Un rapport provisoire a été adressé à la direction de l’établissement, à l’agence régionale de santé (ARS) des Pays de la Loire, à la présidente du tribunal judiciaire des Sables-d’Olonne ainsi qu’à la directrice de cabinet du préfet de Vendée. Les observations formulées par la direction de l’établissement et par la direction générale de l’ARS Pays de la Loire ont été prises en considération pour la rédaction du présent rapport.

Le CHLVO est composé de trois sites dont le principal, visité par les contrôleurs, est implanté à Challans. Il dispose de 376 lits et places, il couvre le Nord-Ouest du département de la Vendée et le sud Loire-Atlantique dont la population compte 670 000 habitants. Il est organisé en cinq pôles dont le pôle de santé mentale qui compte un seul secteur de psychiatrie adulte (85G05) pour une population de 127 000 habitants. Ce pôle comprend deux unités d’hospitalisation complète de vingt lits chacune, toutes deux équipées respectivement de deux chambres d’isolement. Il dispose également d’un hôpital de réhabilitation de semaine de quinze lits, dont l’activité est suspendue depuis septembre 2020 en raison de la crise sanitaire et d’un manque d’effectifs. Le dispositif de soins est complété par des structures ambulatoires. Les deux autres secteurs de psychiatrie adulte du département de la Vendée et la pédopsychiatrie intersectorielle sont couverts par l’établissement de santé mentale de référence : le centre hospitalier Georges Mazurelle (CHGM) de la Roche-sur-Yon. L’existence d’un seul secteur de psychiatrie adulte, implanté à seulement trente-huit kilomètres du CHGM, mérite d’être interrogée mais la région de Challans doit gérer l’afflux de vacanciers durant la période estivale. En outre, l’hôpital, par sa position géographique, facilite l’accès aux soins des habitants des îles de Noirmoutier et d’Yeu.

Le jour de la visite, trente patients étaient hospitalisés dont douze avaient été admis en soins sans consentement. Le pourcentage des soins sans consentement sur les trois dernières années est d’environ 40 %. Ce taux est très élevé au regard de la moyenne nationale de 23,3 %. Plus de 85 % sont des admissions à la demande d’un tiers, 2,4 % étant des admissions en péril imminent. Ce faible pourcentage d’admissions en péril imminent est à mettre au crédit de l’équipe soignante du service des urgences engageant une recherche systématique de tiers. Ces données ont été calculées à la demande des contrôleurs, aucune analyse portant sur l’activité relative aux soins sans consentement n’étant réalisée par l’établissement.

Le pôle de santé mentale a opéré récemment un virage ambulatoire en vue de limiter les hospitalisations et le recours aux soins sans consentement en mettant en place notamment un dispositif de soins intensifs à domicile. D’autres projets comme l’équipe mobile de réhabilitation sociale et l’équipe mobile pour adolescents devraient se concrétiser d’ici la fin de l’année 2021. La refonte du projet de pôle, toujours en cours de réflexion lors de la visite, et menée dans un contexte de changement de gouvernance, ne se déroule pas sans heurts. Le pôle a par ailleurs été confronté à un manque important de médecins psychiatres titulaires ayant affecté la qualité de la prise en charge des patients. Le remplacement par des médecins intérimaires recrutés sur de courtes durées ne peut en effet répondre à des prises en charge psychiatriques au long cours. Cette situation a quelque peu déstabilisé les équipes soignantes en place et plus particulièrement le fonctionnement d’une des deux unités d’hospitalisation.

Concernant les conditions matérielles de prise en charge, les locaux ont fait l’objet d’une rénovation en 2006. Les unités d’hospitalisation offrent des conditions d’hébergement dignes et confortables.

Le contexte sanitaire lié à la pandémie de Covid-19 a conduit à décider d’un certain nombre de mesures pour limiter les contaminations. Lors de la visite, l’accès au jardin commun aux deux unités était interdit aux patients. De même, leur liberté d’aller et venir dans l’enceinte de l’établissement et les permissions de sortir étaient restreintes. Enfin, le nombre et la durée des visites des familles étaient limitées. Si la mise en place de telles mesures peut se comprendre en période de crise aigüe, leur maintien dans le temps sans aucun assouplissement interroge, celles-ci contrevenant notamment au maintien des liens familiaux et à l’autonomie des patients. Depuis la visite du CGLPL, ces restrictions ont été levées dès que la situation sanitaire s’est améliorée. Dans d’autres établissements visités à la même période par le CGLPL, les patients pouvaient circuler librement et la durée des visites n’était pas limitée.

Quant à l’information écrite et orale des patients admis en soins sans consentement, portant notamment sur leurs droits et les voies de recours, celle-ci peut être considérée comme empirique et gagnerait à être protocolisée. Le pôle ne dispose pas d’un véritable bureau des admissions, certaines procédures ne sont pas respectées et le registre de la loi ne fait l’objet d’aucun contrôle hiérarchique. Par ailleurs, les patients ne sont pas systématiquement associés aux décisions médicales les concernant ; à titre d’exemple, ils ne sont pas reçus par le psychiatre lors du renouvellement du certificat mensuel. Dans leur courrier de réponse, la direction et l’ARS Pays de La Loire se sont engagées à mettre en place des mesures correctives dans les meilleurs délais.

En dernier lieu, l’établissement doit s’interroger sur la nécessité du maintien de quatre chambres d’isolement pour aussi peu de lits. L’aménagement de chambres d’apaisement comme alternatives à l’isolement doit être rapidement envisagé. Les chambres d’isolement ne sont pas dotées d’un dispositif d’appel et l’accès aux sanitaires, adjacents à la chambre est parfois interdit. Les patients sont donc contraints d’utiliser un seau hygiénique. Dans sa réponse, la direction fait observer que le recours aux seaux hygiéniques est exceptionnel et limité à 24 heures maximum. La priorité est donnée à la sécurité des patients, l’installation des sonnettes permettra aux patients de demander l’accès aux toilettes. Le CGLPL tient à rappeler que tout patient doit pouvoir accéder aux toilettes et à un point d’eau. Rien ne justifie l’utilisation de seaux hygiéniques qui est une mesure dégradante, portant gravement atteinte à la dignité du patient. Par ailleurs, l’isolement en chambre hôtelière doit être proscrit. La direction indique dans sa réponse avoir mis un terme à cette pratique depuis la visite du CGLPL.

Enfin, les mesures d’isolement – qui étaient au nombre de 135 en 2020 − sont envisagées, à tort, par la communauté médicale comme un outil thérapeutique. Les pratiques et les raisons qui conduisent à mettre en œuvre ces mesures font l’objet d’un rapport annuel, très succinct. Ce sujet n’a jamais été abordé en commission médicale d’établissement.

Les observations formulées à l’issue de la visite ont été prises en compte par la direction de l’établissement qui s’est engagée à mettre en place dans les meilleurs délais des mesures correctives.