Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la deuxième visite du centre hospitalier Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)

Rapport de la deuxième visite du centre hospitalier Robert Ballanger à Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la santé, de l’intérieur et de la justice auxquels un délai de quatre semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Une équipe de contrôleurs a procédé, du 16 au 20 novembre 2020, à une visite des unités de psychiatrie du centre hospitalier intercommunal Robert Ballanger d’Aulnay-sous-Bois (Seine-Saint-Denis). En raison des graves dysfonctionnements constatés, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté a adressé un courrier d’alerte au ministre de la santé à l’issue de la visite.

Le rapport provisoire rédigé ultérieurement a été soumis à l’examen contradictoire de la direction de l’établissement, de l’agence régionale de santé, des chefs de juridiction du tribunal judiciaire de Bobigny ainsi que du préfet de Seine-Saint-Denis afin de recueillir leurs observations. La procureure de la République près le tribunal judiciaire de Bobigny a indiqué, par courrier du 21 mai 2021, n’avoir aucune observation à formuler.

Le 29 juillet 2021, la direction du centre hospitalier a adressé des éléments de réponse apparaissant parfois en contradiction avec les constats opérés lors de la visite, dont les contrôleurs persistent à penser qu’ils sont fondés.

En réponse au courrier qui lui a été adressé par la Contrôleure générale à l’issue de la mission, le ministre de la santé a fait parvenir ses propres observations le 19 août 2021.

L’ensemble des observations recueillies est intégré au présent rapport.

Le centre hospitalier Robert Ballanger, situé sur trois communes (Aulnay-sous-Bois, Tremblay-en-France et Villepinte), dispose de sept pôles cliniques dont un de pédopsychiatrie et un de psychiatrie adulte, composé de trois secteurs géographiques et d’une unité d’accueil et de crise. Le pôle de psychiatrie adulte comprend trois unités pour un total de soixante-six lits d’hospitalisation à temps complet, et celui de pédopsychiatrie, intersectoriel, dispose de huit lits d’hospitalisation à temps complet.

Les difficultés très marquées de recrutement de praticiens hospitaliers (PH) sont partiellement compensées par l’embauche de six praticiens assistants étrangers en cours de formation en psychiatrie, certains ne maîtrisant pas la langue française de façon adaptée à la prise en charge psychiatrique. En conséquence, les soins psychiatriques ne sont pas équivalents entre les trois unités selon qu’ils sont dispensés par des médecins titulaires ou non d’une qualification ordinale en psychiatrie. A contrario, la pédopsychiatrie jouit d’un recrutement de médecins adapté à la réalisation de ses missions, sans déficit.

Si les contrôleurs ont noté la qualité de la prise en charge en pédopsychiatrie et la diversité des activités proposées aux adolescents, ils ont constaté de graves atteintes à la dignité et aux droits des patients au sein du pôle de psychiatrie adulte, qui ont motivé l’envoi d’un courrier au ministre de la santé, dès leur retour de mission.

  • Une méconnaissance des dispositions légales relatives à l’information des patients sur leur situation et leurs droits prévues par le code de la santé publique.

Les droits spécifiques à l’information des patients en soins sans consentement, prévus à l’article L.3211-3 du code de la santé publique, sont partiellement ignorés. La décision d’admission ne leur est pas formellement remise, pas plus que les certificats médicaux successifs.

  • Des pratiques d’isolement et de contention contraires à la loi.

L’isolement et la contention, parfois décidés sans intervention médicale et sans que la politique de réduction de ces pratiques, prévue par la loi, ne soit mise en œuvre, sont effectués dans des conditions illégales et indignes. L’examen des dossiers médicaux a révélé des pratiques d’isolement sans décision médicale tracée ainsi que des isolements maintenus pendant plusieurs jours sans que leur reconduction y soit justifiée.

Des mesures d’isolement sont ainsi maintenues hors du cadre légal – qui précise le caractère de dernier recours et de prévention d’un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui –, et pratiquées dans seize espaces, qui ne respectent ni les normes fonctionnelles en vigueur ni la dignité des personnes isolées.

  • Un registre d’isolement et de contention mal tenu et inexploitable.

Le registre d’isolement et de contention prévu par l’article L.3222-5-1 du code de la santé publique n’est pas tenu ou l’est de manière aléatoire dans les trois unités du pôle de psychiatrie adulte. L’informatisation du dossier patient et, partant, du registre d’isolement et de contention n’est pas effective.

Dans ce contexte, l’absence de contrôle par la commission départementale des soins psychiatriques, définie par les dispositions de l’article L.3222-5 du code de la santé publique et chargée d’examiner la situation des personnes admises en soins psychiatriques sans consentement au regard du respect des libertés individuelles et de la dignité des personnes, est plus que regrettable.