Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Douai (Nord)

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Douai (Nord)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Maison d’arrêt de Douai (2e visite)

 

Synthese

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté et sept contrôleurs ont visité la maison d’arrêt (MA) de Douai (Nord) du 16 au 20 septembre 2019. Il s’agissait de la seconde visite, la précédente ayant eu lieu en 2013.

Un rapport provisoire a été adressé le 9 juillet 2020 au chef d’établissement, au président du tribunal judiciaire (TJ) de Douai et au procureur de la République près ce même tribunal ainsi qu’au directeur du centre hospitalier de Douai. Le procureur de la République a communiqué des observations le 17 juillet 2020, le chef d’établissement le 12 octobre 2020.

La maison d’arrêt offre à la date de la visite 368 places opérationnelles, exclusivement pour des hommes majeurs (23 places en quartier pour les arrivants (QA), 333 en quartier maison d’arrêt des hommes (QMAH), ainsi que 10 en quartier disciplinaire (QD), 11 en quartier d’isolement (QI), 1 cellule de protection d’urgence (CProU), 12 en quartier de semi-liberté (QSL)).

Les bâtiments, érigés en 1907, se présentent comme vétustes malgré des travaux de rénovation effectués entre 2016 et 2019 concernant l’unité sanitaire, les locaux de douches collectives de l’hébergement et du sport, les réseaux d’eau pour offrir l’eau chaude au lavabo en cellule, les robinets d’incendie, etc. Ces travaux se révèlent inefficaces pour améliorer l’état général des conditions de vie dans l’établissement, qui restent marquées par l’usage d’escaliers usés sur quatre étages, des fenêtres situées à plus de deux mètres de hauteur dans les cellules et laissant peu passer la lumière naturelle, une tuyauterie et une robinetterie bruyantes, des revêtements de murs et de sols abîmés, des cours de promenade à l’équipement absent ou dégradé, etc. Aucune personne à mobilité réduite (PMR) ne peut y être accueillie. Le QSL n’offre aucun accès à l’extérieur. La mise en œuvre d’un projet de rénovation des cellules, intégrant finalement un local sanitaire complet dans chacune d’elles, est annoncé pour le début d’année 2021.

Le taux d’occupation du QMAH et du QA réunis est de 143 % : 514 personnes y sont hébergées, deux tiers d’entre elles en encellulement collectif. Le QSL n’est occupé qu’à 50 %, par 6 semi-libres. Les personnes écrouées à la MA de Douai proviennent pour près de la moitié d’entre elles d’autres établissements pénitentiaires, soit pour comparaître devant la cour d’appel de Douai, soit au motif du désencombrement d’autres établissements de la région pénitentiaire.

Le personnel est stable, expérimenté et en nombre suffisant, sauf, conjoncturellement, dans l’encadrement. Mais les rythmes de travail n’ont pas été modernisés et la formation continue est quelque peu délaissée.

Outre le vieillissement général des bâtiments, les conditions matérielles de vie obsolètes voire insalubres et dégradées par la surpopulation et l’encellulement collectif, les constats portent sur des difficultés à obtenir une réponse à sa requête particulièrement flagrantes s’agissant des personnes non francophones, le défaut de mise en œuvre de l’expression collective des personnes détenues, des atteintes aux droits à l’intimité, à la confidentialité voire au secret médical (au greffe, lors de l’usage du téléphone, dans le traitement du courrier, à l’occasion des extractions médicales), des difficultés à accéder aux soins en raison notamment d’un défaut d’action des professionnels en matière de droits sociaux, un système long de distribution des cantines et d’accès à la téléphonie ainsi que l’absence de cantines extérieures ou exceptionnelles, la quasi-absence de travail en atelier et des formations professionnelles insuffisantes, une information parfois erronée sur les voies de recours contre une décision administrative, une gestion des comptes nominatifs entachée d’erreurs, des conditions indignes de réalisation des fouilles notamment en cas d’usage par certains surveillants du magnétomètre, un usage de la force et des moyens de contrainte insuffisamment tracé et trop systématique, l’absence d’activités dans les QA, QI et QSL, l’indisponibilité des conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation tant auprès des personnes détenues que lors des commissions d’application des peines (CAP) et commissions pluridisciplinaires uniques (CPU), etc.

Les contrôleurs ont également relevé certains points positifs, dont :

  • l’instauration de réunions collectives pour les arrivants ;
  • l’instauration d’un régime de respect, au sein duquel un système d’ « audiences libres » est en place ;
  • la prise en charge proposée aux auteurs de violences conjugales.

Des bonnes pratiques sont ainsi identifiées, qui reflètent les aspects positifs d’une relation humaniste de proximité entre le personnel et les personnes détenues.

Si la visite de 2019 a permis de constater que les recommandations de 2013 n’avaient pas été suivies, les observations reçues du directeur de la MA en 2020, soutenues par celles du procureur de la République, ont déjà permis de considérer une dizaine de recommandations comme prises en compte et de comprendre que de nombreuses autres ont été installées sur le métier pour aboutir à une modernisation globale de l’état et du fonctionnement de l’établissement.