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Rapport de la quatrième visite de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Quiévrechain (Nord)

Rapport de quatrième visite de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Quiévrechain (Nord)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Etablissement pénitentiaire pour mineurs de Quiévrechain (4e visite)

 

Synthèse

Quatre contrôleurs se sont rendus entre le 4 mars et le 8 mars 2019 à Quiévrechain (Nord) pour visiter l’établissement pour mineurs (EPM). Il s’agissait de la quatrième visite après celles effectuées en 2008, 2011 et février 2018.

L’établissement situé à la frontière franco-belge se trouve à environ 20 km de la gare de la ville de Valenciennes. Il a été ouvert en septembre 2007 pour accueillir soixante mineurs âgés de 13 à 18 ans et a entraîné la fermeture immédiate des quartiers pour mineurs des maisons d’arrêt de Valenciennes (Nord), Lille (Nord) et Amiens (Somme). Au jour du contrôle, trente-cinq mineurs garçons étaient présents ainsi qu’une seule jeune fille : huit d’entre eux avaient été condamnés, les autres ayant un statut de prévenus. Le taux d’occupation en moyenne est d’environ 73 % mais peut monter à 93 % à certaines périodes de l’année (mois de mai notamment). Le nombre de jeunes prévenus est de plus en plus important chaque année. Le nombre de mineurs non accompagnés (MNA) est en légère augmentation depuis environ trois ans, soit environ 11 % de la population hébergée, chiffre pouvant exceptionnellement monter à 30 % du total des jeunes.

L’établissement est organisé autour de cinq unités de vie de dix places chacune, plus un quartier pour arrivants de six places et une unité réservée aux filles de quatre places. Les structures d’hébergement correspondent à quatre régimes de détention différents qui font une place plus ou moins grande au « collectif » au niveau des repas et des activités.  Dans une des unités, après évaluation de comportement, certains jeunes peuvent bénéficier d’une plus grande autonomie.

Les effectifs de l’administration pénitentiaire comprennent cinquante-sept surveillants qui travaillent sur la base de journées de 13 heures 15, avec des équipes de six agents pour la détention, et des agents sur postes fixes administratifs sur la base de 7 heures 10.

Le service éducatif comprend quarante-cinq personnes dont trente-six éducateurs. Sur chaque unité sont affectés entre trois et six éducateurs qui forment toute la journée un binôme avec les surveillants présents.

L’année scolaire se déroule sur quarante semaines et les cours (huit niveaux et une classe d’accueil) sont dispensés par huit enseignants, des vacataires est des professeurs techniques.

L’unité sanitaire est ouverte tous les jours avec différents professionnels de santé et un médecin coordonnateur qui dépend de l’hôpital de rattachement qui est celui de Valenciennes.

Les contrôleurs ont fait vingt-quatre recommandations. La direction interrégionale des services pénitentiaires de Lille a répondu précisément sur douze de ces recommandations et ses observations figurent en annexe du rapport.

S’agissant des bâtiments et locaux en général, les façades extérieures de certaines unités sont particulièrement dégradées, l’intérieur des cellules est abîmé, les cours de promenade sont sous-équipées et les cellules des jeunes filles ne sont pas assez protégées des regards. Des travaux importants doivent donc être entrepris sans délais.

S’agissant des ressources humaines, il est regrettable que les surveillants ne bénéficient pas d’une formation approfondie avant d’exercer au sein d’un EPM qui prend en charge un public spécifique.

Sur le plan disciplinaire, la procédure n’est pas totalement satisfaisante : la place et la nature des mesures de bon ordre sont mal définies, la présence d’un éducateur n’est pas systématique en commission de discipline et les rapports écrits font parfois défaut. Le quartier disciplinaire en lui-même est mal aménagé, la cellule est sombre, la douche mal installée, la cour de promenade non équipée. Par ailleurs le mineur ne voit pas systématiquement le médecin et n’est plus suivi sur le plan scolaire.

La notion d’éducateur-référent n’est pas comprise par les mineurs et les modalités pour les informer doivent être revues.

Les activités proposées aux mineurs sont apparues insuffisantes, notamment pendant les périodes de week end.

S’agissant du maintien des liens familiaux, les conditions d’accueil au parloir ne sont pas satisfaisantes et l’utilisation en détention des postes téléphoniques ne permet pas la confidentialité des conversations.

Concernant la prise en charge des mineurs qui nécessite une bonne évaluation des comportements, l’examen des situations individuelles notamment en commission pluridisciplinaire, mériterait que les avis des professionnels de santé soient plus souvent recueillis, tout en respectant le secret médical.

Toutefois, les contrôleurs ont relevé de nombreux points positifs et très encourageants pour l’avenir qui sont portés de façon dynamique par la nouvelle directrice de l’établissement et la directrice du service éducatif.

Le pôle enseignement avec un directeur très présent depuis de nombreuses années continue à dispenser des cours et des formations de qualité grâce à un groupe d’enseignants toujours très motivés, pour permettre aux jeunes en difficulté de quitter l’EPM avec des bases plus solides.

D’une façon générale, on peut sentir la volonté de rendre l’environnement des jeunes le plus agréable possible, en les faisant participer à l’atelier qui permet la création de remarquables fresques murales.

L’établissement qui a traversé une période particulièrement difficile au cours de l’été 2018 retrouve peu à peu une certaine sérénité. Les responsables des quatre institutions (administration pénitentiaire, service éducatif, éducation nationale, unité sanitaire) renouent le dialogue pour apaiser les tensions et faire en sorte que la prise en charge des mineurs soit toujours bien assurée et de qualité.