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Rapport de la deuxième visite du centre pénitentiaire de Châteauroux (Indre)

Rapport de la deuxième visite du centre pénitentiaire de Châteauroux (Indre)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Centre pénitentiaire de Châteauroux (2e visite)

 

Synthèse

Six contrôleurs ont effectué une visite du centre pénitentiaire « Le Craquelin » de Châteauroux (Indre) du 13 au 17 mai 2019. L’établissement avait fait l’objet d’un premier contrôle du 17 au 20 juillet 2012. Un rapport provisoire a été adressé le 17 octobre 2019 à la directrice du centre pénitentiaire, au président du tribunal de grande instance de Châteauroux, au procureur de la République près le même tribunal et à la directrice du centre hospitalier de Châteauroux.

Le centre hospitalier a fait part de ses observations par courrier en date du 19 novembre 2019. Le président du TGI et le procureur de la République ont adressé une réponse conjointe le 2 décembre 2019.

Mis en service en octobre 1992 dans le cadre du « Programme 13 000 », le centre pénitentiaire regroupe une maison d’arrêt, un centre de détention et un quartier de semi-liberté. En gestion déléguée, l’établissement dispose des moyens pour fonctionner correctement et est en bon état général. Il ne connaissait pas, au moment du contrôle, de tension excessive sur les effectifs de surveillance même si l’ouverture, en 2017, de l’unité de vie familiale s’est faite à effectifs constants alors que cinq surveillants y sont affectés.

D’une capacité théorique de 95 places en maison d’arrêt et de 257 en centre de détention, auxquelles s’ajoutent 13 places en semi-liberté, l’établissement accueillait au moment du contrôle 371 personnes détenues pour 365 places théoriques, soit un taux global d’occupation de 101,64 %. Mais si le taux d’occupation du centre de détention était de 90 %, celui de la maison d’arrêt atteignait les 140 %.

Malgré une réputation d’établissement « sévère », l’ambiance en détention est apparue comme relativement sereine, tant au sein de la population pénale qu’avec les personnels de surveillance, abstraction faite de quelques comportements individuels vexatoires ou humiliants que la direction se doit de traiter. Les nombreuses activités d’enseignement, sportives et socioculturelles proposées contribuent positivement à cette ambiance.

Un régime de détention « progressif » est mis en œuvre au sein du centre de détention. Toutefois, les modalités de mise en œuvre de ce régime ne présentent pas toutes les garanties nécessaires au regard des droits fondamentaux des personnes détenues. L’absence d’harmonisation des critères et pratiques entre unités, la confusion établie avec les sanctions disciplinaires, la non-formalisation des décisions, la part laissée au libre arbitre des chefs de bâtiment sans regard pluridisciplinaire en CPU… portent en germe des risques d’arbitraire. Par ailleurs, les durées de séjours en régime « portes fermées » sont manifestement excessives pour certaines personnes détenues et vont à l’encontre de la progressivité affichée. Le régime « contrôlé », institué pour les auteurs de grandes violences, est, du fait de ses modalités de fonctionnement constatées lors du contrôle, attentatoire aux droits fondamentaux des personnes auxquelles il s’applique et doit être abrogé.

Plus globalement, les décisions relatives à leur détention doivent être prises en commission pluridisciplinaire, motivées et dûment notifiées aux personnes détenues. La direction doit aussi s’atteler à redéfinir le cadre réglementaire et les conditions de réalisation des fouilles. Les mesures de sécurité prises lors des consultations médicales et lors des extractions doivent être proportionnées et respectueuses du secret médical et de l’intimité des soins.

Si le travail et la formation professionnelle sont organisés avec dynamisme, plusieurs points font l’objet de recommandations : critères d’accès et modalités de déclassement, rémunération, conditions et temps de travail, etc. Le droit au maintien des liens avec l’extérieur est altéré par le coût des communications téléphoniques (et le manque de confidentialité des points-phone, dans l’attente de l’installation des téléphones en cellule), l’absence de réflexion sur l’accès à internet, les difficultés d’accès à l’établissement le week-end et les modalités de suspension ou d’annulation des permis de visite. Malgré tout, les visites au parloir sont organisées avec efficacité et humanité et le fonctionnement de l’unité de vie familiale donne satisfaction.

L’accès au droit est globalement garanti. En revanche, l’exécution des peines souffre d’une politique d’aménagement parcimonieuse. Enfin, les délais de traitement des demandes de transfèrement sont trop longs, entraînant des réactions jusqu’au-boutistes de certaines personnes détenues pour obtenir satisfaction, comme le blocage du quartier disciplinaire.

Nonobstant ces points d’amélioration, l’établissement dispose d’atouts sur lesquels la nouvelle direction doit s’appuyer.