Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Saintes (Charente-Maritime)

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Saintes (Charente-Maritime)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la justice auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

Synthèse

Du 2 au 5 octobre 2017, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, accompagnée d’une équipe de cinq contrôleurs a visité la maison d’arrêt de Saintes (Charente-Maritime). Cette mission constituait une deuxième visite après celle effectuée du 8 au 12 avril 2013. Des problèmes internes au contrôle général des lieux de privation de liberté ont perturbé la réalisation du rapport provisoire qui n’a pu être transmis au chef d’établissement ainsi qu’aux autorités administratives et judiciaires que le 9 mai 2019. De plus ce rapport ne traite pas de l’accès aux soins dans l’établissement. Le nouveau chef d’établissement a fait valoir dans sa réponse datée du 17 juin 2019 que depuis sa prise de fonction le 1er juillet 2018, il a pris en compte nombre des recommandations formulées.

La maison d’arrêt de Saintes est un établissement de centre-ville très ancien dont la pérennité a longtemps été discutée. C’était notamment la principale question qui se posait lors de la visite de 2013. Depuis, le maintien de l’établissement a été décidé et en conséquence de nombreux travaux effectués : eau chaude aux robinets, interphonie, installation électrique, remplacement progressif des ouvrants, etc. Il n’en demeure pas moins que les lieux sont étroits et ne peuvent être agrandis, avec de plus la contrainte que pose l’impossibilité d’y pénétrer en véhicule automobile.

La capacité théorique de l’établissement est de soixante-seize places pour les hommes, huit places pour les femmes et quatre places dans le quartier de semi-liberté. Lors de la visite, entre 113 et 120 hommes étaient incarcérés pour un taux d’occupation de 158 % en moyenne. La population pénale masculine se répartit dans des cellules recevant jusqu’à six personnes parfois sur des matelas au sol dans les conditions de promiscuité que l’on peut imaginer.

Le personnel est apparu en nombre suffisant, expérimenté et globalement bienveillant avec la population pénale malgré le point négatif que constitue l’absence totale de surveillance du quartier des femmes la nuit. Au niveau de la gouvernance le constat, tant en interne qu’auprès des autorités administratives et judiciaires, était celui d’une lassitude générale et du souhait de changement de l’actuel titulaire proche de la retraite et depuis trop longtemps en poste.

Les principaux constats négatifs de la visite de 2013 visaient l’obsolescence et l’absence d’entretien des locaux, constats qui n’ont plus lieu d’être après les travaux effectués, même si l’architecture pose des contraintes insurmontables et si le quartier de semi-liberté est toujours dans un état déplorable. Les relations de l’époque entre le service pénitentiaire d’insertion et de probation et la direction de l’établissement n’ont guère progressé et le constat le plus sévère de la présente visite concerne précisément le fonctionnement du SPIP.

Enfin, le système de rémunération du travail dénoncé en 2013 n’a évolué que sur la forme, car il reste identique sur le fond en raison du chantage au départ effectué par le concessionnaire.

Les problématiques de l’établissement sont celles des établissements de centre-ville avec des paradoxes. Il est clair que la surpopulation pénale au quartier des hommes entraine des situations de promiscuité difficilement tolérables. Cependant, les personnes détenues rencontrées disent apprécier l’établissement principalement pour son « humanité », constat que partage le personnel attaché à l’établissement et attaché à le faire fonctionner avec souplesse. Malgré cela, des incidents assez graves ont pu être constatés sur fond d’absorption d’alcool massive en raison des projections, permanentes en centre-ville.

Le service pénitentiaire d’insertion et de probation était en faillite totale lors de la visite et ne fournissait plus à la population pénale les services qu’elle est en droit d’attendre. Cette situation connue et dénoncée par les magistrats sur fond de guerre interne et revendications permanentes était déjà en germe lors de la visite de 2013.

Ces carences permanentes ont de graves effets sur l’accès des personnes détenues à leurs droits en matière d’aménagement des peines et de préparation à la sortie.