Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de visite du centre éducatif fermé de Saint-Pierre du Mont (Landes)

Rapport de visite du centre éducatif fermé de Saint-Pierre-du-Mont (Landes)

Observations du ministre de la justice – CEF de Saint-Pierre-du-Mont

SYNTHESE

La Contrôleure générale des lieux de privation de liberté, a effectué une visite du centre éducatif fermé (CEF) de Saint-Pierre-du-Mont, du 3 au 5 septembre 2014. Inauguré en septembre 2013, il remplace l’ancien CEF de Mont-de-Marsan, contrôlé par le CGLPL en 2009, qui a été fermé en raison de l’inadaptation de ses locaux à la prise en charge des enfants. A l’issue de leur visite, les contrôleurs ont rédigé un rapport de constat, qui a été communiqué le 26 mars 2015 à la directrice du centre éducatif fermé. Cette dernière a fait part de ses observations le 22 mai 2015.

En mars 2013, le premier établissement a été détruit par un incendie, événement qui constituait au moment du contrôle un traumatisme encore vivace pour l’équipe éducative. Or, en avril 2015, un autre incendie a nécessité la fermeture de la nouvelle structure du CEF. En l’état, elle est fermée pour un temps indéterminé.

I/ Avec une structure nouvelle et une équipe en transition, l’application d’un cadre plus strict est nécessaire.

Au moment de la visite, la directrice était en poste depuis un an et le responsable de l’unité éducative depuis deux mois ; ils formaient un fragile binôme de direction ; six éducateurs venaient d’être renouvelés. Ce contexte de transition était difficile, d’autant que, le CGLPL en a été informé par la suite, le responsable d’unité éducative a été remplacé à l’issue de sa période d’essai. Au-delà de la complexité de gérer une équipe dont le tiers est renouvelé et dont une partie reste traumatisée par l’incendie survenu en 2013, il semble quelque peu ambitieux de faire de la direction d’un CEF le premier poste d’une jeune directrice en début de carrière.

Les locaux, récents et lumineux, sont fonctionnels. Il en émane toutefois une impression de laisser-aller : carreaux cassés, plafond endommagé, salles d’activités en désordre, propreté douteuse des locaux communs (salle de restauration, buanderie, sanitaires…), réparations qui tardent. Un soin plus attentif doit être porté à ces questions. De plus, les chambres non occupées devraient être nettoyées et condamnées pour éviter que des rassemblements s’y tiennent en l’absence de personnel éducatif.

Selon les termes du règlement intérieur, la vie des jeunes est rythmée par des tâches inhérentes à la vie en collectivité et qui structurent la journée : rangement quotidien des chambres, activités obligatoires chaque matin, ménage hebdomadaire. En pratique, ces règles ne sont pas toujours appliquées et le rangement et l’hygiène des chambres sont laissés à l’appréciation personnelle de chacun. De même, alors que l’accès aux chambres est supposé interdit pendant la journée, des jeunes ont été vus en train de dormir en fin de matinée. Il convient que l’équipe éducative soit plus attentive à la surveillance des jeunes, ainsi qu’à leur accompagnement dans l’apprentissage de l’hygiène.

La réponse aux incidents a été définie en trois niveaux, en fonction de la gravité de l’acte commis. Elle fait l’objet d’une procédure formalisée. L’individualisation des sanctions et les mesures de réparation sont mises en avant. Or, les dossiers des jeunes étaient mal renseignés voire non renseignés pour certains d’entre eux, et les réponses sont appliquées de manière fluctuante selon les professionnels. Cette absence de règle univoque nuit à la prise en charge de mineurs en attente d’un cadre clair.

Enfin, ambiguïté est la règle concernant la question du tabac. Le règlement intérieur pose une interdiction de fumer dans le centre. En réalité, six « pauses cigarette » journalières sont prévues, la dotation de dix euros par semaine allouée à chaque jeune servant essentiellement à l’achat de cigarettes, et la sanction disciplinaire la plus fréquemment utilisée étant la privation de fumer lors des « pauses ». Dans un tel jeu subtil, la norme devient illisible.

II/ Malgré des bonnes pratiques encourageantes, des améliorations restent nécessaires.

Des activités de prévention ont été mises en place au bénéfice des éducateurs en vue de gérer de manière appropriée les situations de violence. L’absence de recours à la contention dans la gestion des incidents est un indicateur de leur efficacité.

Le maintien des liens familiaux est l’objet d’efforts importants : déplacements au sein des familles effectués par la psychologue et l’éducateur, prise en charge des frais de transport et d’hébergement des familles, information sur chaque décision importante ou leur présence aux réunions de synthèse.

Les repas sont principalement confectionnés à base de produits frais et appréciés des jeunes. Néanmoins, ils ne font l’objet d’aucun suivi diététique ou contrôle de la part de la hiérarchie du centre. Une attention particulière doit également être portée aux conditions de conservation des denrées alimentaires.

Lors du contrôle, réalisé la semaine de la rentrée scolaire, seuls deux des huit jeunes ont suivi des cours dispensés par un professeur. Il est regrettable qu’aucune convention ne soit établie avec un collège voisin pour une prise en charge scolaire, partielle ou complète.

Enfin, comme cela avait été annoncé en réponse à la visite de 2009, la psychologue intervient désormais à plein temps, ce qui représente incontestablement une amélioration. En revanche, l’accès aux soins psychiatriques dans le centre a disparu, sauf dans l’urgence, en cas de crise. Le centre hospitalier de Mont-de-Marsan n’aurait pas les ressources suffisantes pour assurer une telle prise en charge. Il convient de trouver rapidement une formule permettant de combler cette lacune.