Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la troisième visite du centre de rétention administrative du Canet à Marseille (Bouches-du-Rhône)

Rapport de la troisième visite du centre de rétention administrative du Canet à Marseille (Bouches-du-Rhône)

Observations du ministre de l’intérieur_CRA du Canet à Marseille (3e visite)

 

SYNTHESE

En application de la loi du 30 octobre 2007 instituant le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, quatre contrôleurs ont effectué une visite du centre de rétention administrative (CRA) du Canet à Marseille du 29 septembre au 2 octobre 2014. Cette visite était inopinée. Cet établissement avait fait l’objet de deux visites précédentes en 2009 et 2010.

Les installations sont inchangées depuis la visite précédente. Le CRA dispose de cinq unités de vie, représentant au total 76 places destinées aux hommes et 20 places destinées aux familles. L’effectif théorique des policiers est de 145.

Les contrôleurs ont ressenti de la part des personnels de la police lassitude, indifférence voire méfiance vis-à-vis des personnes retenues. Les contacts sont rares, souvent distants et autoritaires, à l’exception des équipes de la cellule d’aide et d’appui à l’éloignement, qui tentent d’apaiser les conflits. Les effectifs sont parfois réduits, ce qui aboutit à des situations dégradées préjudiciables aux personnes retenues : annulations des visites ou des nettoyages des zones de vie, ou impossibilité de se rendre dans les bureaux de l’OFII et de Forum Réfugié. L’usage du tutoiement est excessif.

Il règne au sein des unités de vie un régime d’autonomie très peu contrôlée, ce qui entraîne une forte insécurité, avec des problèmes de racket et de bagarres ; la sûreté des objets personnels, documents ou traitements médicaux n’est pas assurée. La tension est accrue par l’absence de consultation spécialisée de psychiatrie pour un grand nombre de personnes qui en ont besoin. Il est à cet égard regrettable que le projet de consultation de psychiatre ait été abandonné alors qu’il était approuvé par l’assistance publique hôpitaux de Marseille (AP-HM).

Il serait toutefois regrettable que la mise en place, envisagée au moment de cette visite, de zones d’autonomie contrôlée aboutisse à une déshumanisation du centre avec une perte de contacts entre les fonctionnaires et les personnes retenues.

La coordination entre les agents de la PAF et les intervenants n’est pas satisfaisante, ce qui nuit aux personnes retenues, qui ne peuvent, de ce fait, user de leurs droits les plus élémentaires en particulier vis-à-vis de l’unité médicale, de l’OFII ou de Forum Réfugiés. Le formulaire intitulé « Vos droits en rétention » n’est pas systématiquement remis à la personne lors de son placement en rétention. Le règlement intérieur n’est pas conforme au modèle règlementaire. Le recours aux interprètes paraît inexistant.

L’ensemble des unités de vie est particulièrement dégradé. Une remise en état, notamment des espaces collectifs, s’impose. L’organisation du nettoyage quotidien des parties communes des unités de vie n’est pas satisfaisante. Leur état est plus dégradé que lors des précédentes visites.

Le transfert de la responsabilité de l’organisation des activités de l’OFII à la cellule d’aide et d’appui à l’éloignement, sans aucun budget associé, n’a aucun justificatif et a entrainé une disparition totale de toute activité. Contrairement aux termes du règlement intérieur, les cours de promenade ne disposent d’aucun équipement et les « salles d’activités » sont vides de tout équipement de type baby-foot. L’organisation des repas des agents, contrainte par les repas des personnes retenues, entraîne une accélération du deuxième tour de repas de ces derniers, lequel est réduit à une vingtaine de minutes avec invitation pressante et autoritaire pour les « retardataires » à quitter la salle au plus vite.

Enfin, l’accès aux soins n’est pas garanti en raison de l’organisation des mouvements vers l’unité médicale, d’un système de signalement indirect des demandes de consultation et d’une configuration inadéquate des locaux.