Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Savigny-sur-Orge (Essonne)

Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Savigny-sur-Orge (Essonne)

Observations du ministre de la justice – CEF de Savigny-sur-Orge (2e visite)

 

SYNTHESE

Quatre contrôleurs du Contrôle général des lieux de privation de liberté ont effectué une visite annoncée du centre éducatif fermé de Savigny-sur-Orge (Essonne) du 1er au 4 décembre 2014.

Cet établissement a fait l’objet d’une première visite, à la Garde des sceaux, ministre de la justice qui a répondu le 22 février 2013.

A l’issue de leur visite de 2014, les contrôleurs ont rédigé un rapport de constat, qui a été communiqué le 12 juin 2015 au chef d’établissement. Ce dernier a fait part de ses observations le 17 juillet 2015.

I/ Le centre éducatif fermé de Savigny-sur-Orge, géré par la direction de protection judiciaire de la jeunesse, offre une capacité théorique de douze places accueillant des garçons et des filles mais ne reçoit, au plus, que onze garçons et jamais de filles.

Il est implanté au sein d’un vaste domaine appartenant au ministère de la justice, accueillant notamment différentes structures de la protection judiciaire de la jeunesse. Un terrain de sport est désormais installé sur l’emprise du centre et des aménagements ont été entrepris à l’intérieur du bâtiment (salle de télévision et bibliothèque) pour améliorer les conditions de vie des mineurs. Cet établissement est facilement accessible par les transports en commun mais, cela avait déjà été indiqué lors de la précédente visite, il devrait faire l’objet d’une signalisation adaptée dans la ville et d’un panneau sur le porche d’entrée.

L’équipe pluridisciplinaire a été renforcée depuis 2010, notamment avec l’affectation d’une seconde psychologue et d’un agent technique. Malgré cela, des difficultés subsistent. La situation demeure tendue en raison des absences d’éducateurs, et de la présence d’éducateurs contractuels dont la formation est parfois éloignée de leur emploi. Ces difficultés sont accrues par un secrétariat ne fonctionnant réellement qu’à temps partiel. Le directeur et le responsable d’unité éducative comblent ces insuffisances au-delà du raisonnable.

Le faible taux d’occupation interroge cependant, comme en 2010, sur le fonctionnement de ce CEF.

II/ Des constats opérés, certains éléments sont incontestablement positifs.

Le centre dispose de bons atouts pour la prise en charge des mineurs avec un enseignant du premier degré et un professeur technique de la protection judiciaire de la jeunesse ainsi qu’avec un accès à des structures extérieures et un réseau conséquent d’artisans accueillant des jeunes en stage.

Le renforcement de la prise en charge de la santé mentale, annoncé à l’issue de la précédente visite, est effectif : deux psychologues à temps plein et un psychiatre (à raison d’une demi-journée par semaine) interviennent désormais au centre.

La nouvelle installation de l’infirmerie permet aux mineurs de contacter plus facilement l’infirmière qui exerce ses fonctions à temps plein. Cette dernière a réorganisé la dispensation des médicaments comme l’avait préconisé le Contrôleur général des lieux de privation de liberté à l’issue de sa précédente visite.

Depuis la visite de 2010, un protocole de collaboration a été établi entre le président du tribunal de grande instance d’Evry, le procureur de la République près le même tribunal, le directeur départemental de la sécurité publique de l’Essonne et le directeur départemental de la protection judiciaire de la jeunesse de l’Essonne pour le traitement des incidents et un document de suivi de ces incidents est désormais ouvert. Les pratiques des éducateurs devraient cependant être harmonisées, notamment en cas de fugue.

La mise en place d’une commission des menus associant les mineurs et la confection de plats « faits maison » avec des produits frais constituent de bonnes pratiques qui méritent d’être soulignées.

III/ Certaines situations nécessiteraient cependant des améliorations. L’équipe de direction mérite d’être soutenue et encouragée dans la tâche entreprise.

Les recommandations formulées par l’inspection des services judiciaires et le plan d’action élaboré par la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse devraient permettre à l’équipe de direction, fortement déstabilisée par des changements trop fréquents de directeur, de disposer des outils nécessaires, avec un nouveau projet de service, un règlement de fonctionnement actualisé et un règlement intérieur, pour faire progresser ce centre. Un rapport annuel plus exhaustif devrait aussi être produit.

Le règlement de fonctionnement, qui aborde les transgressions, devrait définir l’échelle des sanctions qui manque cruellement. Il est impératif que le travail engagé aboutisse pour que les réponses à apporter soient enfin fixées. Un registre des sanctions devrait être simultanément ouvert. Les pratiques relatives à la possibilité de fumer ou à la possession de téléphones portables et les dispositions du règlement de fonctionnement devraient être harmonisées. Il est difficilement concevable d’autoriser dans la pratique ce qui est interdit par le règlement, les mineurs présents ayant besoin de repères clairs.

Comme le soulignait déjà le précédent rapport, « les familles devraient être associées plus étroitement à la prise en charge, pas seulement en cas d’incident lors du départ ou du retour du jeune au CEF, mais pour l’ensemble du projet éducatif concernant leur enfant ». Cette situation n’a malheureusement guère progressé.

Il est regrettable que les installations sportives en place, avec un terrain de sport extérieur de création récente et une salle de musculation bien équipée, soient si peu utilisées ; l’absence d’un éducateur sportif est pénalisante. Le programme d’activités des mineurs devrait être plus précis et éviter des termes trop génériques, aboutissant parfois à des improvisations de dernière minute.

Comme lors de la précédente visite, « le nombre des retours en famille surprend pour des mineurs qui cumulent un parcours judiciaire et, souvent, des handicaps sociaux. Les informations communiquées aux contrôleurs n’ont pas permis de déterminer si ces retours constituaient une orientation par défaut ou l’aboutissement d’un véritable parcours d’insertion ». Cette observation demeure toujours d’actualité, faute de pouvoir déterminer si ces retours en famille ont constitué des solutions pérennes et en l’absence d’étude de cohorte des mineurs.