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Rapport de la quatrième visite de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Meyzieu (Rhône)

Rapport de la quatrième visite de l’établissement pénitentiaire pour mineurs de Meyzieu (Rhône)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Etablissement pénitentiaire pour mineurs de Meyzieu (4e visite)

 

Synthèse

Trois contrôleurs se sont rendus du 11 au 15 mars 2019 à l’établissement pénitentiaire pour mineurs (EPM) situé dans le département du Rhône, sur la commune de Meyzieu. Il s’agissait d’une quatrième visite programmée de l’établissement, les précédentes ayant été réalisées en avril 2009, septembre 2014 et mars 2018.

L’EPM, situé à 16 km de la ville de Lyon et desservi par plusieurs transports en commun, se trouve à proximité d’une zone industrielle en plein développement économique et démographique ; mais la fréquence des transports en commun ne facilite pas les visites des familles.

L’EPM qui a ouvert ses portes en avril 2007 a une capacité d’accueil de soixante places pour des mineurs âgés de 13 ans à 18 ans (garçons et filles). Le 11 mars 2019, l’établissement accueillait trente-sept jeunes dont quatre jeunes filles et un garçon de moins de 16 ans.

Le nouveau chef d’établissement a pris ses fonctions au mois de septembre 2017.

Pour la restauration, l’hôtellerie, la maintenance et le nettoyage, la gestion est déléguée à la société privée SODEXO.

La zone d’hébergement de l’établissement comprend sept unités de vie, avec un quartier pour les garçons arrivants, une unité réservée aux filles, et cinq unités pour les garçons.

La structure ne comporte ni miradors, ni chemins de ronde, mais la vidéosurveillance est très développée ; par ailleurs, l’ajout à partir de 2012 d’épinoches, de grillages dans la cour, de concertinas et la pose sur les façades de panneaux en acier galvanisé renforce l’apparence très sécuritaire et froide de l’ensemble.

Sous l’autorité du chef d’établissement et du directeur-adjoint, l’encadrement est assuré par trois lieutenants, un major et dix premiers surveillants. Le personnel de surveillance comprend cinquante-trois surveillants ; les vacances de poste sont nombreuses et le taux d’absentéisme est en baisse mais reste important. De ce fait, le temps de présence des surveillants au sein des unités n’est pas optimal.

Dans le dernier rapport de constat plusieurs bonnes pratiques avaient été relevées et aujourd’hui on constate encore que :

  • les différents partenaires institutionnels peuvent se rencontrer avec des psychologues pour échanger sur leurs pratiques professionnelles ;
  • de nombreuses cellules ont été refaites à neuf et les graffitis et les dégradations sont rares ;
  • les droits et les devoirs des mineurs sont clairement affichés en face des portes des cellules ;
  • les mineurs placés au quartier disciplinaire bénéficient d’un temps scolaire ;
  • une attention particulière est portée sur les mineurs non accompagnés ;
  • la maison d’accueil ouverte en 2017 et le « café des familles » accueillent les proches des mineurs dans un espace convivial permettant des échanges constructifs avec le personnel qui prend en charge les jeunes détenus.

En revanche le précédent rapport avait mis en évidence un certain nombre de dysfonctionnements et formulé de nombreuses recommandations qui n’ont pas toutes été suivies d’effet.

Ainsi, le contrôle effectué en mars 2019 a permis d’observer les éléments suivants  :

  • concernant la détention au quotidien

S’agissant des différents régimes de détention proposés, leurs différences ne sont pas assez visibles pour encourager les jeunes à vouloir évoluer et mieux se comporter pour disposer d’une plus grande autonomie et donc de plus de liberté en détention.

Sur les locaux, l’on constate que les cours de promenade sont particulièrement sales et peu entretenues et que rien n’est proposé aux jeunes pour les sensibiliser au problème général de la propreté en tous lieux.

Sur le plan de la restauration, le principe doit rester celui de la prise en commun des repas avec tous les jeunes et le binôme éducateur-surveillant ; par ailleurs l’étiquetage des plats servis apparaît nettement insuffisant.

L’accès à l’air libre chaque jour n’est pas garanti pour tous les jeunes, car la promenade d’au moins une heure par jour n’est pas assurée.

Les jeunes détenus indigents ne reçoivent pas dans des délais raisonnables les sommes nécessaires dont ils ont besoin notamment pour acheter un minimum de produits cantinables.

La coordination entre les services de l’éducation nationale et l’unité sanitaire doit s’améliorer, pour faire en sorte que les jeunes puissent assister à leurs cours en totalité ;

  • concernant la discipline

Les mesures de bon ordre sont peu variées. En matière disciplinaire, les comptes-rendus d’incidents sont rédigés tardivement, les enquêtes n’apparaissent pas assez approfondies et la vidéo-surveillance n’est pas exploitée.

L’examen médical en cellule disciplinaire n’est pas systématique.

Le port des menottes pour les placements en prévention sont très fréquents ; pour les extractions médicales, le niveau d’escorte n’est pas respecté et les moyens de contrainte sont trop souvent utilisés, sans individualisation de la mesure.

Les fouilles systématiques sont très nombreuses, avec un manque de traçabilité certain. Et les fouilles intégrales présentent toujours un caractère humiliant pour les jeunes personnes détenues ;

  • concernant la santé

Un protocole doit être établi afin de modifier les modalités de distribution des médicaments et éviter que des jeunes commettent des actes graves contre leur propre personne, notamment le week-end, lorsque la présence infirmière est rare.

En conclusion, l’établissement a connu de nombreux changements depuis l’année 2017, et la rédaction du nouveau projet d’établissement s’impose avant la fin de l’année 2019. Parmi ces changements, il faut noter l’ouverture en février 2019 d’une unité de dix places pour la prise en charge individualisée et renforcée de mineurs en grande difficulté sur le plan scolaire et éducatif.

Le projet de service réactualisé de l’équipe éducative est en cours de refonte, compte tenu de l’arrivée d’un nouveau chef de service, avec pour objectif la redéfinition des modalités de prise en charge des mineurs. Une attention particulière doit être apportée sur le temps de présence des surveillants dans les unités d’hébergement. En effet, la cohérence des actions du binôme éducateur-surveillant est primordiale dans ce type d’établissement.

Un enseignement de qualité est dispensé par des enseignants motivés et impliqués, avec des résultats très encourageants et pour certains mineurs la redécouverte de l’univers scolaire.

Les nouveaux objectifs se discutent lors de réunions avec les quatre partenaires institutionnels qui ont commencé en 2018 et qui sont encore organisées régulièrement par des chefs de service dynamiques.