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Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard)

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Maison d’arrêt de Nîmes (2e visite)

 

SYNTHESE

Cinq contrôleurs ont effectué une visite de la maison d’arrêt de Nîmes (Gard) du lundi 28 novembre au vendredi 5 décembre 2016. Cette mission constituait une deuxième visite, faisant suite à un premier contrôle réalisé du 6 au 9 novembre 2012.

Un rapport de constat a été adressé le 16 mai 2017 au chef d’établissement, à la directrice du centre hospitalier universitaire de Nîmes et au directeur du centre hospitalier Le Mas Careiron.

La maison d’arrêt, dont la mise en service date de 1974, comporte cinq quartiers distincts répartis au sein d’un bâtiment : le quartier des arrivants hommes (QA), le quartier de détention des hommes, le quartier des femmes, le quartier disciplinaire (QD), le quartier d’isolement (QI) ; le quartier de semi-liberté (QSL) est situé à l’extérieur de l’enceinte de la maison d’arrêt et accessible en longeant le mur d’enceinte. La capacité d’accueil des quartiers spécifiques (QA, QD, QI) et des quartiers d’hébergement n’a pas évolué depuis 2012. L’établissement dispose de 189 cellules : 126 au quartier de la maison d’arrêt des hommes, 20 au quartier des femmes hors la cellule de punition (QF), 6 au quartier disciplinaire hommes, une au QF, 7 au quartier d’isolement (QI), 9 au quartier des arrivants et 20 au quartier de semi-liberté.

La structure immobilière est, comme en 2012, caractérisée par la vétusté et le sous-dimensionnement de l’ensemble des locaux (unité sanitaire, parloirs…) au regard de la surpopulation pénale. Afin de diminuer le nombre de matelas au sol, l’établissement a doté de sommiers à roulettes la plupart des cellules des personnes vulnérables et des femmes. Pour désencombrer la détention, le directeur a décidé de transformer une ancienne salle polyvalente en deux cellules pour l’hébergement chacune de six personnes. Depuis la visite de 2012, une nouvelle salle de musculation dotée d’équipements modernes et d’un vaste espace de douches a été installée à l’extérieur du bâtiment, à proximité du terrain de sport. De même, un programme de réfection des cellules a été engagé depuis 2014, notamment celles des personnes vulnérables et des femmes.

La maison d’arrêt de Nîmes reste confrontée à l’un des taux de sur-occupation les plus élevés parmi l’ensemble des établissements pénitentiaires (206 % au moment de la visite/210 % en 2012). La maison d’arrêt connaît une surpopulation pénale endémique tant dans le quartier des hommes que dans celui des femmes[1]. La capacité théorique de la maison d’arrêt est, comme en 2012, de 192 places et, la capacité réelle de 352 lits (hors le quartier d’isolement, le quartier disciplinaire et la CProU[2]). Le 28 novembre 2016, la maison d’arrêt hébergeait 397 personnes détenues dont 37 dormaient sur un matelas au sol ou un sommier à roulette (29 au quartier des hommes et 8 au quartier des femmes). Au moment de la visite, la durée moyenne d’incarcération était de 4,5 mois, même si certains condamnés hommes et femmes étaient hébergés à la maison d’arrêt depuis plusieurs années[3]. Au 1er janvier 2016, la répartition entre les prévenus et les condamnés montrait que 44 % des personnes détenues étaient prévenues, la moyenne nationale s’élevant à 25 %[4].

Le directeur, présent depuis 2012, a professionnalisé les quartiers spécifiques depuis la dernière visite. Les personnes détenues sont gérées par des surveillants expérimentés sachant faire preuve de bienveillance. Le taux d’absentéisme et les heures supplémentaires des surveillants affichent aujourd’hui des volumes raisonnables et la relation avec la personne détenue se révèle globalement apaisée. Il manque cependant toujours huit surveillants.

L’utilisation intensive des locaux vétustes et l’insuffisance des espaces aggravent les conditions d’hébergement et le quotidien des personnes détenues. Ainsi, les personnes sont hébergées à deux ou trois dans des cellules de 9 m² ou à six dans des cellules surencombrées de 18 m², dont l’état de dégradation est déplorable en raison de l’absence d’isolation thermique et d’aération. Les structures sous-dimensionnées sont inadaptées : le quartier des femmes ne comporte pas de cellule arrivante ; les quartiers spécifiques ne désemplissent pas (le quartier des arrivants pour les hommes et le quartier disciplinaire) ; le quartier de semi-liberté est le seul à ne pas être sur-occupé. De même, l’exiguïté des locaux de l’unité sanitaire entraîne des délais de prise en charge préjudiciables pour les personnes détenues.

Les conditions d’hygiène doivent être améliorer : notamment, des espaces de douches dégradés par l’humidité et l’absence d’aération, et insuffisants en raison de la sur-occupation de l’établissement.

La gestion des affectations est complexe et les critères prévalant pour la séparation des prévenus et des condamnés, fumeurs et non-fumeurs, jeunes et plus âgés, peu ou pas respectés. Il s’ensuit une cohabitation difficile, justifiant les nombreuses demandes de changement de cellules.

Le maintien des liens familiaux n’est toujours pas respecté, les parloirs se déroulant dans une salle commune sans intimité ni confidentialité.

Par ailleurs, la recommandation de 2012 sur la nécessité de mettre en place rapidement une organisation spécifique à la prise en charge des auteurs d’infractions à caractère sexuel est toujours d’actualité ; les moyens humains de l’unité sanitaire étant insuffisants au regard de la surpopulation.

La qualité de la gestion du quartier de semi-liberté doit être à soulignée, les détenus conservant leur téléphone portable.

Les autorités judiciaires sont particulièrement sensibilisées à la question de la surpopulation, avec une politique d’aménagement des peines dynamique et travaillent en partenariat avec tous les acteurs concernés par cette problématique.

Nonobstant le projet de construction d’un nouvel établissement pénitentiaire dans le département, une enveloppe budgétaire spécifique pour financer des travaux d’investissement est nécessaire dans l’urgence pour améliorer les conditions d’hébergement et le quotidien des personnes détenues.

[1] L’établissement a connu un pic de sur-occupation en 2016.

[2] Cellule de protection d’urgence.

[3] Deux femmes condamnées à 22 et 30 ans de prison y vivent depuis six ans.

[4] Chiffres du rapport d’activité 2015.