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Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques)

Rapport de la deuxième visite de la maison d’arrêt de Bayonne (Pyrénées-Atlantiques)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, aux ministères de la justice et de la santé auxquels un délai de huit semaines a été fixé pour produire leurs observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

Suivi des recommandations à 3 ans – Maison d’arrêt de Bayonne (2 visite)

 

SYNTHESE

En application de la loi du 30 octobre 2007 qui a institué le Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL), cinq contrôleurs ont effectué un contrôle de la maison d’arrêt (MA) de Bayonne (Pyrénées Atlantiques), du 9 au 13 janvier 2017. Le rapport de constat portant sur cette visite a été adressé au chef d’établissement et au directeur du centre hospitalier de la côte basque (CHCB) le 4 mars 2017. Le directeur du CHCB a fait parvenir ses observations qui ont été intégrées au présent rapport.

Cette mission constituait une deuxième visite de la MA faisant suite à un premier contrôle réalisé du 27 au 30 avril 2009 par quatre contrôleurs et à une enquête menée par deux contrôleurs conduite du 29 au 31 janvier 2013 à la MA et au CHCB sur les difficultés rencontrées dans les extractions médicales.

La MA occupe des bâtiments construits à l’usage d’établissement pénitentiaire entre 1879 et 1891, et mis en fonction le 16 octobre 1891. Cet établissement est implanté au centre-ville à 800 mètres de la gare SNCF. Sa capacité théorique est de soixante-quinze places, comme en 2009, réparties entre soixante-dix places en détention et cinq au quartier de semi-liberté.

Une sur-occupation toujours préoccupante

En avril 2009, la sur-occupation était la préoccupation permanente de l’établissement. En janvier 2017, cette préoccupation a diminué. La sur-occupation persiste dans des proportions moindres qu’en 2009 mais demeure supérieure à celle annoncée dans les réponses du ministre de la justice en date du 16 septembre 2010 et de celle de la secrétaire d’Etat à la santé du 27 juin 2011. Au 1er janvier 2017, 122 personnes détenues étaient écrouées, dont 102 en détention, soit un taux d’occupation globale de 136 %.

Un personnel compétent, expérimenté et en nombre suffisant

Les effectifs théoriques sont similaires à ceux constatés lors de la précédente visite, mais avec une présence effective des surveillants pénitentiaires.

Une organisation de la détention satisfaisante mais des points négatifs qui persistent

L’organisation de la procédure d’accueil est bien rodée même si les informations sont mal assimilées par les personnes détenues. La commission pluridisciplinaire unique (CPU) remplit sa mission, même si l’application GENESIS est insuffisamment renseignée et par voie de conséquence insuffisamment exploitée.

Le transfert des personnes vulnérables vers l’étage présente les garanties recherchées.

Les cours de promenade ont été améliorées avec l’installation d’un point d’eau, d’un urinoir et de bancs. En dépit des engagements ministériels, l’eau chaude n’arrive pas dans les cellules ; seules les deux cellules réservées aux arrivants, dont l’une est double, possèdent des douches. La cellule disciplinaire demeure sombre et froide.

Des droits des personnes détenues globalement respectés avec des marges de progrès

Le caractère systématique des fouilles intégrales pour les mouvements à l’extérieur, et des fouilles par palpation lors des mouvements intérieurs est contraire à la loi. Les niveaux d’escorte et les niveaux de surveillance définis en CPU doivent être respectés ; la présence systématique de surveillants pénitentiaires lors des consultations médicales à l’extérieur ne permet pas de respecter le secret médical.

Les passages en commission de discipline sont traités trop lentement.

Les visites aux parloirs sont assurées avec humanité mais impossibles pendant les week-ends ; par-ailleurs la réservation des parloirs plus de vingt-uatre heures avant la date prévue pour la visite est impossible. Les points-phone, situés dans les cours de promenade, sont inaccessibles aux heures de repas et le soir, pendant les heures de présence des familles à leurs domiciles ; les numéros gratuits ou spécifiques comme celui du CGLPL ne sont accessibles qu’avec l’autorisation préalable de l’administration.

Il n’existe toujours pas de boite à lettre en détention autre que celle des aumôniers et celle difficilement accessible de l’unité sanitaire en milieu pénitentiaire (USMP) : il n’est pas acceptable que les surveillants recueillent les demandes de consultation.

L’équipe de l’USMP assure la prise en charge des personnes détenues de façon efficace malgré des conditions difficiles. Installée dans la détention, ses locaux sont trop petits et en nombre insuffisant. L’installation de nouveaux locaux doit être une priorité. Les hospitalisations et consultations externes sont réalisées sans retard.

L’obtention et le renouvellement des documents d’identité et titres de séjour n’aboutissent que rarement, indépendamment de la durée de la détention des demandeurs.

La diffusion des informations institutionnelles vers la population pénale est manifestement insuffisante car rares sont les formulations de demande d’entretien avec le délégué du Défenseur des droits, les visiteurs de prison, les aumôniers, le point d’accès au droit (PAD) – qui ne compte que des avocats –, comme les demandes d’activités socioculturelles. Seul le sport est l’objet de demandes qui sont honorées. La création d’un canal interne de télévision n’est pas à l’ordre du jour.

L’ouverture des droits sociaux est bien assurée : le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP) organise des commissions pluridisciplinaires avec la caisse primaire maladie.

Des défaillances en matière de travail et une action du SPIP en compensation

Aucun atelier de travail n’a été installé depuis 2009, date de la première visite. Les raisons architecturales invoquées à cette époque restent inchangées et demeurent un facteur limitant. Les formations professionnelles délivrées, qui ont fait leurs preuves, atténuent modérément cette situation. Une augmentation de la capacité d’accueil du quartier de semi-liberté est nécessaire au regard des besoins de la population pénale, parfois dépourvue de logement, et de l’offre d’emploi bien réelle à proximité de la MA.

La mise en place de parcours professionnels constitue un axe central du projet du SPIP dont la participation de la mission locale aux CPU et la permanence un jour par semaine d’un représentant de Pôle Emploi sont deux exemples. Il serait cependant opportun que la personne prévenue remise en liberté rencontre le CPIP de permanence avant la levée d’écrou.

Les dossiers de préparation d’aménagement de peine ne sont adressés aux SPIP des établissements vers lesquels les personnes détenues condamnées sont transférées que si les personnes détenues le demandent. Ces envois devraient être systématiques.

En conclusion, cette petite maison d’arrêt aux locaux apparemment inadaptés rend des services inégalables comparés à ceux qu’aurait une structure éloignée du centre-ville, du centre hospitalier, du tribunal de grande instance, des services de proximité et des moyens de transport.

Sous réserve de conserver son humanité et de poursuivre ses adaptations, cet établissement est appelé à durer. L’oralité est son mode normal de fonctionnement, efficace, mais il suffit de peu de choses pour que les bonnes habitudes disparaissent faute de procédures.