Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de visite de l’établissement public de santé mentale de La Roche sur Foron (Haute-Savoie)

Rapport de visite de l’établissement de santé mentale de La Roche sur Foron (Haute-Savoie)

Le rapport de visite a été communiqué, conformément à la loi du 30 octobre 2007, au ministère de la santé auquel un délai de huit semaines a été fixé pour produire ses observations. A la date de publication de ce rapport, aucune observation n’a été produite.

 

SYNTHESE

En application de la loi du 30 octobre 2007 qui a institué le Contrôleur général des lieux de privation de liberté, six contrôleurs ont effectué une visite annoncée de l’établissement public de santé mentale de la vallée de l’Arve (Haute-Savoie), du lundi 4 au vendredi 8 août 2014.

Créé deux ans avant la visite, l’EPSM de la vallée d’Arve apparaît à bien des égards comme une structure encore en transition et offrant un visage contrasté, en particulier lorsqu’on compare le fonctionnement, plus disparate que cohérent, de chacune des six unités d’hospitalisation complète. Ainsi, l’USIP dont les équipes dynamiques prodiguent des soins de qualité est insuffisamment utilisée ; à l’inverse, l’unité des patients hospitalisés à long terme semble plus atone.

Au-delà, l’incessant flux de mutations du personnel (déjà renouvelé de moitié depuis l’ouverture), aux causes complexes et impossibles à réduire au seul attrait pécuniaire présenté par la proximité avec la Suisse, nuit à la nécessaire stabilité de cet établissement. La réduction sensible de cette mobilité, par une politique ambitieuse de fidélisation, apparaît dès lors comme une priorité à bref délai.

La prise en charge des patients souffre de divers maux, résumés comme suit par un interlocuteur rencontré : « on s’éloigne de notre cœur de métier, l’humain ». La prise en charge globale des patients par la nouvelle génération de professionnels est marquée par une perte d’empathie.

Outre des carences relevées en matière de notification des décisions de placement et des droits inhérents ainsi que de recueil des observations, c’est tout le processus d’accueil et d’admission des nouveaux patients qui doit être repensé, notamment pour ne jamais reposer après 17h30 sur un agent de sécurité, faute de cadres de santé présents sur site. Les patients subissent le plus souvent un quotidien terne, rythmé par la télévision ou la cigarette, et peu animé par une offre d’activités thérapeutiques ou simplement occupationnelles. Le défaut d’informations, le manque de coordination culturelle et la rareté de la pratique sportive encadrée constituent d’autres éléments de faiblesse.

Par ailleurs, le suivi somatique demeure lacunaire, un seul médecin généraliste ne pouvant assurer cette fonction : le recrutement immédiat d’un autre médecin s’impose.

Enfin, le recours trop banalisé et immédiat à l’isolement, en particulier de manière systématique pour les personnes détenues, et à la contention interroge quant aux pratiques professionnelles. Des modes de gestion moins traumatisants doivent être envisagés.

Ainsi que l’a confié un agent expérimenté rencontré : « Nous sommes devenus maltraitants ».  Pourtant, dans son courrier de réponse en date du 7 octobre 2015, le directeur considère qu’ « il ne nous semble pas que la visite ait mis en évidence une situation de maltraitance globale, même si certaines pratiques précises sont clairement inadaptées ». Un tel écart de perception de la situation mérite que l’établissement s’interroge sur le caractère impersonnel de sa prise en charge ainsi que sur les causes du mal-être qui justifie la rotation du personnel soignant. Le comité d’éthique, qui semble dynamique, devrait s’en saisir.