Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

Rapport de la troisième visite du centre de rétention administrative de Plaisir (Yvelines)

Rapport de la troisième visite du centre de rétention administrative de Plaisir (Yvelines)

Observations du ministre de l’intérieur – CRA de Plaisir (3e visite)

 

SYNTHESE

Quatre contrôleurs du contrôle général des lieux de privation de liberté ont effectué une visite du CRA de Plaisir du 29 septembre au 1er octobre 2014. Cette visite est la troisième opérée par le CGLPL, les deux précédentes ayant eu lieu en 2008 et en 2010. Un rapport de constat a été adressé le 27 septembre 2015 au chef du centre. En l’absence de réponse de sa part, le présent rapport reprend l’intégralité des constats effectués lors de la visite.

L’effectif du personnel affecté est inférieur de douze personnes à l’effectif de référence ; cette carence est aggravée par l’absentéisme pour maladie (sept personnes au jour de la visite). Dans cette situation, l’’administration a limité le nombre de personnes accueillies, ce qui a induit l’hypothèse d’une fermeture du centre, hypothèse qui n’était toujours pas clairement levée, ou confirmée, lors de la visite des contrôleurs. Cette incertitude alimente une spirale négative.

L’ambiance du CRA de Plaisir est loin d’être empreinte d’harmonie.

Si des améliorations en termes de mobilier ont été apportées dans l’hébergement des personnes retenues, l’essentiel des constats précédents reste d’actualité et la situation globale s’est nettement dégradée.

Le manque d’activité et la structure de la cour de promenade y rendent l’enfermement particulièrement pesant.

Les conditions matérielles de travail des agents sont inconfortables : bureaux exigus et sur occupés, absence de salle de repos.

Les incidents qui surviennent en rétention ne trouvent pas toujours la suite judiciaire que les circonstances appellent. Or, un traitement judiciaire systématique des incidents est une garantie essentielle. L’opacité d’un traitement purement administratif est de nature à entretenir un climat de suspicion néfaste à l’institution comme aux fonctionnaires qui la servent.

La traçabilité des pratiques, notamment de l’utilisation des moyens de contrainte, est insuffisante. Ainsi, les images du dispositif de vidéosurveillance doivent pouvoir être enregistrées ou conservées. La formation des policiers affectés au centre de rétention doit être renforcée afin d’améliorer non seulement la qualité de leur service mais également leur motivation.

Le droit à la confidentialité des entretiens avec les proches est toujours méconnu en raison, non seulement des locaux dans lesquels le visites se déroulement mais également des pratiques de surveillance mises en œuvre. Par ailleurs, il est arrivé que les fonctionnaires du CRA refusent l’entrée de visiteurs, au motif que l’effectif de policiers présents était insuffisant pour assurer les transferts vers la salle de visite et la surveillance de l’entretien. Cette atteinte au droit des personnes retenues a été sanctionnée par le juge des libertés et de la détention qui, en conséquence, a ordonné une mainlevée de la rétention. Désormais, en pareil cas, en vue de prévenir ce motif de libération, l’administration produit devant le juge, un document attestant de l’impossibilité matérielle d’assurer le droit de visite. Une telle parade est inacceptable : l’administration doit affecter un nombre suffisant de policiers pour assurer le droit au maintien familiaux des personnes retenues.

L’incertitude sur le maintien du centre alimente inquiétudes, sentiment d’inutilité et désinvestissement. Effet pervers de la situation, le sous-effectif lors de la visite offre un prétexte difficilement contestable qui permet aux mauvaises volontés de s’exprimer librement. La réaction de la hiérarchie à ce délitement n’est pas toujours de nature à redonner la cohésion d’équipe qui fait défaut. C’est ainsi que s’il est justifié d’avoir réduit le nombre de personnes retenues, les contrôleurs exprimeront des doutes légitimes sur les proportions dans lesquelles cette décision a été appliquée.

Lors du contrôle, les trois ou quatre personnes retenues ne suffisaient pas à occuper les policiers présents.

Dans une situation de menace de fermeture et d’attente de décision, d’autres services ont eu à cœur de démontrer leur utilité, leur engagement et la pertinence de leur pérennité. La spirale négative dans laquelle ce service de police s’est engagé pose légitimement la question de l’opportunité de continuer de confier des personnes retenues à des fonctionnaires vivant un tel traumatisme professionnel.

On rappellera que, parmi toutes les personnes privées de liberté, ce public des étrangers en situation probable de reconduite est l’un des plus difficiles.