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Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Mulhouse (Haut-Rhin)

Rapport de la deuxième visite du centre éducatif fermé de Mulhouse (Haut-Rhin)

Observations du ministre de la justice -CEF de Mulhouse (2e visite)

 

SYNTHESE

Une équipe de quatre contrôleurs a visité le CEF de Mulhouse (Haut-Rhin) durant trois jours, du 29 juin au 2 juillet 2015. Il s’agissait de la deuxième visite, la précédente ayant eu lieu en septembre 2011.

LES POINTS FORTS 

L’établissement est géré par l’association régionale spécialisée d’action sociale, d’éducation et d’animation (ARSEA), une association bien implantée dans le domaine de l’éducation. Il est dirigé par la même personne depuis l’ouverture, une directrice dynamique et exigeante, dont l’autorité est apparue manifeste, tant auprès de l’équipe éducative que des jeunes accueillis. Elle semble efficacement secondée par deux chefs de service.

L’organisation est précise : les professionnels disposent de « fiches-métier » constituant des repères utiles, l’équipe de direction s’attache à fournir des « outils » susceptibles de guider les pratiques (fiches, projets…), les échanges d’information sont organisés.

Les activités sont variées – scolarité, ateliers, stages – adaptées aux besoins des mineurs et à leurs possibilités.

Les familles sont informées des règles de fonctionnement du CEF et de l’évolution de leur enfant.

Les éducateurs – dont une proportion non négligeable dispose d’une relative qualification – assurent une présence attentive auprès des jeunes. Ils sont décrits comme impliqués et soucieux d’apprendre.

LES POINTS FAIBLES

Le point de fragilité est précisément l’équipe : après une période de stabilité remarquable, plusieurs de ses membres ont choisi de quitter le CEF en même temps, a priori pour des raisons personnelles. Compte-tenu des difficultés de recrutement et d’un renouvellement affectant une partie importante de l’équipe, le CEF risque de connaître des moments difficiles.

Par ailleurs, un courrier anonyme a été adressé au CGLPL ainsi qu’à diverses autorités en janvier 2016, faisant état de graves dysfonctionnements de la part de plusieurs éducateurs (consommation d’alcool et de stupéfiants avec les mineurs, relations sexuelles d’une éducatrice avec un mineur, prosélytisme religieux). La PJJ en est informée, le parquet a diligenté une enquête. Même si la forme (anonymat) incite à la prudence, ce courrier ne peut être totalement ignoré.

LE SUIVI DES OBSERVATIONS ANTERIEURES

Trois observations avaient été faites à l’occasion de la précédente visite, portant sur le DIPC, les fouilles et la laïcité.

Le DIPC : au moment du dernier contrôle, le DIPC, stricto sensu, n’était pas en renseigné. Les contrôleurs ont toutefois observé que, dans les faits, le parcours du jeune était connu, qu’il était accompagné dans un projet personne individualisé et élaboré avec lui, que la famille était informée, que les notes et rapports au magistrat rendaient compte des évolutions. La directrice, dans sa réponse au rapport de constat, a indiqué que le DIPC était désormais rempli.

Les fouilles et autres pratiques attentatoires aux droits fondamentaux : depuis la précédente visite, le CEF s’est doté d’un détecteur de métaux, ce qui, en pratique, n’empêche pas les « fouilles » de se poursuivre. Elles ne semblent pas systématiques mais il arrive régulièrement qu’un mineur soit invité à de déshabiller et à s’entourer d’une grande serviette pendant que ses vêtements sont fouillés. Le jeune serait parfois conduit à ôter son caleçon. Depuis la visite, une note de la PJJ est venue interdire totalement ce type de fouille. La directrice, dans sa réponse au rapport de constat, indique que cette limite est désormais prise en compte. Comme la plupart des directeurs de CEF, elle s’interroge sur la manière d’assurer la sécurité au sein de l’établissement tout en préservant l’intimité et la dignité des mineurs. Le contrôle du téléphone s’effectue de manière plus souple.

S’agissant de la laïcité, les contrôleurs, qui ont effectué la visite durant le mois du Ramadan, ont pu observer que les jeunes avaient la possibilité de respecter les prescriptions alimentaires imposées par leur religion.

On notera qu’au moment du contrôle, un jeune était accueilli dans l’optique d’une « déradicalisation ». Pour autant qu’il soit possible de mesurer la sincérité des intentions et l’efficacité des méthodes, l’équipe semblait très impliquée dans ce projet.