Site du Contrôleur Général des Lieux de Privation de Liberté

EDITO

Le site s’enrichit de nouveaux rapports de visite et du rapport du Contrôleur général des lieux de privation de liberté pour l’année 2009, le second rapport annuel.

Fidèles à la ligne adoptée depuis le début, nous entendons à la fois mettre à la disposition de l’internaute l’état constaté des lieux et des personnes visités et l’autoriser à porter un jugement sur la méthode et l’efficacité du travail suivi.

Sur l’état existant, il ne s’agit pas tellement de faire, comme on l’a trop vite écrit, un « énième constat accablant sur la prison », comme si nous nous contentions ici de répéter ce que d’ardents professionnels ou militants ou élus ont perçu depuis des années. Il ne s’agit pas seulement de constater une fois de plus que les locaux sont affreux, sales et méchants, comme le disait ironiquement un jour un cinéaste. Mais il s’agit précisément de dépasser cette seule photographie des lieux, de parvenir à décrire non pas l’eau qui suinte, mais l’ennui, la souffrance et l’angoisse qui sourcent ; de mettre en cause non pas la hauteur des murs mais la condition du malade sous contrainte, du gardé à vue ou du prisonnier ; de témoigner non pas des animaux nuisibles dans les cellules, mais de ce que nombreux sont, parmi les captifs rencontrés, ceux qui ont le sentiment qu’on les traite « comme des chiens ».

Et à partir de cet approfondissement de comprendre pourquoi le système fonctionne ainsi ; pourquoi on en est là, aujourd’hui, malgré les avertissements qui n’ont pas manqué, malgré l’amélioration incontestable de la qualité des professionnels, malgré les mesures mises en œuvre qui sont importantes.

Tel est l’objet des principaux chapitres du rapport annuel, qui portent respectivement sur l’activité et la vidéosurveillance dans les lieux clos, ainsi que sur la perception de la sécurité par les personnels.

L’efficacité du travail suivi. Le Contrôleur général est comptable non pas des effets de ses constats : ils sont l’affaire des ministres auxquels il adresse des recommandations. Mais au moins de sa force de persuasion et aussi de la nécessaire protection de ceux qui lui font confiance et ont recours à lui.

Des choses changent. Le débat sur la garde à vue et sur ses chiffres a été ouvert ; celui sur la vie dans les prisons mises récemment en service aussi. Ils se poursuivront tant qu’ils ne se traduisent pas par des évolutions substantielles. D’autres prendront leur suite : des constats sévères sont également dressés sur l’enfermement progressif des unités psychiatriques et l’excès de sécurité par rapport à l’état réel des malades ; sur l’insuffisance  des liens de la prison avec l’extérieur ; sur les difficultés des établissements accueillant des mineurs…

Mais ces débats ne doivent pas se faire aux dépens de ceux qui s’adressent, de leur lieu de captivité, au contrôle général. Sur ce plan, il y a encore dans les lieux de privation de liberté, lorsqu’il s’agit de s’exprimer ou se plaindre, beaucoup trop de craintes, de menaces, voire de représailles après l’envoi d’un courrier ou un entretien avec des contrôleurs. La loi elle-même a été trop timorée pour les prévenir ou les faire cesser. Ce chantier-là fait aussi partie des urgences.

Jean-Marie Delarue